Le 24 octobre prochain, Thurston Moore, le cofondateur de Sonic Youth publie “Sonic Life: A Memoir”, son autobiographie. Souvenirs de son arrivée dans le New York punk, délabré et arty des années 1970.
Thurston Moore vient d’annuler sa tournée US pour des raisons de santé. Sa tournée ? Oui, mais sa tournée promotionnelle, censée soutenir la sortie le 24 octobre prochain de Sonic Life: A Memoir, son autobiographie. Pas traduit en français pour l’instant, le bouquin du cofondateur de Sonic Youth, très attendu, sera sous le sapin des kids électrifié·es pour Noël, huit ans après la parution de Girl in a Band (2015), l’autobiographie de Kim Gordon – bassiste du groupe et figure tutélaire de la rock nation.
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Ne boudons pas notre plaisir, les ami·es. Il n’est pas garanti que les artistes d’aujourd’hui – celles et ceux que nous chérissons le plus, du moins – ressentent un jour le besoin de poser leurs fesses derrière une machine à écrire pour raconter leur histoire, qui se confond souvent avec la grande, celle des lieux, des scènes et des personnages annexes, souvent iconoclastes, qui la peuplent. Notre intuition nous dit que la façon de documenter le quotidien de nos jours pourrait bien, à terme, se soustraire au besoin de nos futur·es vétéran·es de la musique de s’épancher sur leur vie et leur œuvre 400 pages durant. Peut-être aussi qu’on se trompe, et ça sera tant mieux. En attendant, le pote Moore explique dans un communiqué : “Ce livre racontre l’histoire de mon enfance, alors que je tombais amoureux de la musique, et comment cela m’a conduit à New York, où j’allais cofonder Sonic Youth.” Il rajoute qu’avec cet exercice, produit d’une plongée vertigineuse dans sa mémoire, il pense avoir été capable de “capturer le tourbillon des expériences qu’impliquait le fait de faire partie de Sonic Youth et des communautés créatives dans lesquelles [ils et elle évoluaient].”
New York punk
Si nous n’avons pas encore eu le privilège de lire Sonic Life, un chapitre a été publié en avant-première sur le site du magazine américain Esquire. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la promesse susmentionnée de restituer un portrait du jeune Thurston Moore dans le New York délabré du punk naissant est respectée.
Nous voici ainsi renvoyé·e en 1977, à East Village, dans ce coin de Manhattan appelé Alphabet City, essentiellement habité par des Noir·es, des Latinos·as, et des artistes à la dérive. Moore trouve un appart au carrelage décrépit, dans un immeuble peuplé de types louches, qui lui volent son électricité et tentent de le transformer en dealos. L’un d’entre eux n’a pas de dents. Un jour, il le retrouve dans une mare de sang sur son palier. Parfois, le gosse de sa nouvelle voisine frappe à sa porte et vient discuter avec lui. Il raconte que des années plus tard, il le recroise dans la rue en train de faire le caïd, et se pose la question du destin des plus démuni·es dans les “rues sauvages” de la Grosse Pomme, qui ressemblent à celles des bouquins de Mickey Spillane et Hubert Selby, Jr. Plus loin, à quelques blocs de chez lui, vivent entassé·es dans le même appartement James Chance, Sumner Crane, Lydia Lunch et Jim Sclavunos (le “Rat Pack de la No Wave”), et un poil plus loin encore, Allen Ginsberg, le poète Peter Orlovsky, Arthur Russell et Richard Hell cohabitent au même moment, là où vivait Kerouac quelques années plus tôt.
Un temps de vaches maigres
Quand il ne peut plus tirer des sous à sa mère, Moore gagne sa vie en se livrant à des essais cliniques qui le rendent malade. C’est un temps de vaches maigres, comme on dit, mais rien ne semble entamer la détermination et une certaine joie de vivre au milieu des débris du capitalisme du jeune Moore, obsédé par sa guitare et son ampli. On a hâte de lire le reste, bien sûr. Mais on peut déjà dire que ces quelques pages ont fait un bout de chemin en nous. Dans un temps où tout semble éphémère, vite oublié, balayé, binaire, le besoin de raconter nous semble plus vital que jamais. Vital et urgent.
Édito initialement paru dans la newsletter Musiques du 13 octobre. Pour vous abonner gratuitement aux newsletters des Inrocks, c’est ici !
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