Exit, pour cette fois, la suspicion qui nous conduit parfois à ignorer la musique de ces jeunes gens que l’on voit dans les tabloïds anglais photographiés avec des lunettes de soleil sur le nez : Clinic est un bon groupe. Peut-être que ce qui plaît dans cette compilation de leurs premiers singles est le fait […]
Exit, pour cette fois, la suspicion qui nous conduit parfois à ignorer la musique de ces jeunes gens que l’on voit dans les tabloïds anglais photographiés avec des lunettes de soleil sur le nez : Clinic est un bon groupe. Peut-être que ce qui plaît dans cette compilation de leurs premiers singles est le fait que ce quatuor de Liverpool mélange le dictionnaire de l’urgence avec l’encyclopédie de la paresse, qu’il sache faire de grandes chansons pas marquées par le temps en bougeant très peu des doigts. Pas obsédés par le bonheur béat, les garçons de Clinic possèdent un sens de l’humour viscéral, une incroyable expressivité dont le chanteur Ade Blackburn se fait le porte-parole. Agglomérant dans sa voix le meilleur de trois générations de chanteurs anglais à poigne, le voilà qui tour à tour proteste, méprise, miaule, dort et jouit en se foutant de la gueule du monde. Il est le ludion de cette musique minimale, basique et rigide. Sans doute à fin d’économie de mouvements, le groupe a emprunté une certaine raideur à Devo ou Suicide. Ça se caractérise par des rythmes légers, un jeu de guitare souvent millimétré et un orgue sans marque qui pollue très bien ces enthousiasmants IPC sub-editors dictate our youth et Cement mixer au final éjaculatoire. Clinic nous évoque en vrac les Modern Lovers, Wire et les Beach Boys tels que bousillés par les mains corrosives d’une sorte de Bela Lugosi. Abonné aux garages de par ses idées, sons et références, Clinic rajoute tout un cortège d’effets cheap qui ne ressemblent pas à du vernis : échos sinistres, scratches rouillés, basses sonores et guitares handicapées. On aime aussi lorsque leur urgence monte encore d’un ton, qu’ils laissent tomber toute patience, histoire de vomir trois minutes de punk parfait tout en guitares-perceuses afin d’atteindre un but avoué : celui de tout casser en nous faisant rigoler. Mais l’urgence, ça fait mal aux mains, alors Clinic part dormir et Ade Blackburn offre ses rêves tour à tour balbutiants (Kimberley), fantasques (Monkey on your back), voire érotiques (l’étonnant Porno qui se perd dans une marée d’harmonicas) pendant que les accords et rythmes tournent au ralenti quelque part dans l’ombre. Complet, cosmique et fantastique, c’est en remuant la terre et en la balançant de tous les côtés que Clinic vient de s’offrir une place de rêve en plein soleil : ils sont le futur de la pop anglaise à haut indice d’octane.
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