Un tantinet décevante, la troisième soirée des Transmusicales au Liberté, placée sous le double signe de l’electro et du hip-hop, permettra en tout cas de témoigner de la grande forme de l’Autrichien Peter Kruder et des américains de The Weather. Récit presque chronologique d’une dernière soirée rennaise.
Il est bien tard vendredi soir lorsque la voiture dans laquelle je me suis installé avec quelques-uns de mes camarades de week-end débarque à Rennes. Bien trop tard pour espérer découvrir les différentes affiches du soir, mais, heureusement, assez tôt pour profiter d’une vie nocturne alcoolisée dans le centre ville.
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Ce sont mes premières Transmusicales, un événement en soi ! Quoiqu’en disent les festivaliers, la fête se déroule en premier lieu dans la rue. Malgré un froid piquant, je découvre une ville en pleine effervescence, les rues sont bondées, les bars aussi et ce flot ininterrompu de jeunes plus ou moins sous l’emprise de l’alcool fait plaisir à voir. Une sorte de feria de Bayonne en Arctique, sans les costumes blancs et rouges mais avec cette même envie d’en découdre avec la fin de la nuit
Si la journée s’est passé dans un état semi-comateux, oubliant même l’attendu concert des Girls in Hawaii dans le cadre des Bars en Trans (excellent selon les ouï dire), je me sens d’attaque pour affronter une nuit de musique non-stop. Direction La Liberté pour une des affiches les plus cohérentes du festival : au Liberté Bas, l’electro protéiforme a la main mise sur la programmation tandis qu’au Liberté Haut, le hip-hop et la soul se partagent la scène.
En bas, les Allemands de Tiefschwarz commencent leur set devant un public en pleine forme. Pas très fine, leur electro bagarreuse, matinée de fortes influences eighties, se révèle d’une redoutable efficacité. Ces deux DJs semblent s’amuser comme des petits fous et le public ne tarde pas à les rejoindre dans cet état euphorique de début de soirée.
Le temps de réunir les troupes (un au bar, un autre déjà au bord du malaise, un porté disparu et les autres particulièrement excités) et me voilà à l’étage au-dessus pour découvrir sur scène les facéties hip-hop des Five Deez. Old school, roublard, efficace, leur hip-hop permet de garder les jambes en alerte même si le son, très approximatif, agace fortement.
Originaires de Cincinatti mais signé sur le label allemand !K7, ces cinq lascars sont suffisamment ouvert d’esprit pour lancer quelques beats de house au milieu de leur show sautillant.
Le temps de reprendre des munitions et nous voilà un étage en dessous, découvrant DJ Morpheus entouré des percussionnistes réunionnais d’El Diablo, occupé à filer un coup de trans ethnique aux Bretons en furie. Efficace et carrée, la tambouille reste tout de même légèrement indigeste. Et moi de pleurer d’avoir raté ce même Morpheus à la tête de la reformation de ses mythiques et glacés Minimal Compact l’avant-veille au même endroit
La transition avec l’autrichien Peter Kruder se fait en douceur. Sans son coéquipier Dorfmeister, Peter ne semble pas très à l’aise. Il prouvera cependant en deux heures de temps qu’il est un brillant DJ, aux influences les plus diverses. Oscillant entre hip-hop abstrait, house minimale, funk, electro-jazz et beaucoup d’autres bonnes choses, son set sera le plus réussi de ce plateau electro, malgré quelques inévitables fautes de goût qu’on lui excusera bien volontiers.
Même si mes jambes commencent à bouder, je profite d’une accalmie dans le set de l’ami Kruder pour aller voir les très attendues Madlib, Peanut Butter Wolf et Medaphoar à l’étage du dessus. Le show de l’écurie Stones Throw, bastion californien du hip-hop underground et du funk roots, sera pourtant une sacrée déception. Le son, toujours aussi approximatif, n’aidera pas le trio qui affiche la grise mine des mauvais jours. Un mix de funk digital particulièrement raté du pourtant doué Peanut Butter Wolf finira de provoquer le premier gros coup de barre de la soirée
Ce concert sonnera le glas pour quelques-uns de mes camarades qui rentreront s’abriter en lieu sûr. Pourtant, et ce n’est pas faute de leur avoir répété, l’intrigant collectif américain The Weather va bientôt succéder aux malchanceux californiens. Auteur d’un album étonnant qui paraîtra en France ces prochains mois, cette association de deux MCs réputés, Busdriver et Radioinactive, et de l’électronicien abstrait Daedelus, sera ainsi la révélation de la soirée.
Avec un flow extra-terrestre où leur respiration est mise à rude épreuve, les deux MCs s’attèlent à déjouer le mix hautement ludique de l’agile Daedelus. Entre abstraction pure et dure, tranches de music-hall claudiquant et quelques percées old-school, ces trois-là donnent de belles fessés au hip-hop et montrent singulièrement la voie aux mariages entre l’électronique et le hip-hop.
En redescendant, on se trémoussera quelques dizaines de minutes sur le mixe lourdaud de l’allemand Alexander Kowalski, jeune nerd aux lunettes effrayantes, dont la deep house se révélera un tantinet énervante et totalitaire.
5h30, il est temps pour moi de regagner mon couchage. Un dernier regard sur la salle permet de se rendre compte de l’état des troupes. Dans la fosse, quelques centaines d’agités continuent la fête, le regard torve et les membres alourdis, pendant que sur les gradins, tous les autres accusent le coup d’une soirée d’excès. Une certaine idée de l’apocalypse !
Décevante, cette soirée n’en reste pas moins un bon souvenir grâce aux excellentes prestations de Peter Kruder et de The Weather. L’année prochaine, c’est promis, on reviendra s’encanailler chez nos amis les bretons. Bon anniversaire les Trans !
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