Un album où soul et folk passent brillamment l’épreuve du minimalisme.
En 2004, après un premier album passé inapercu ? Monarch (1999) ?, Feist sort Let It Die. Un deuxième album solo à la classe folle, sur lequel elle promène avec une élégance déconcertante sa voix voilée dans le jazz, le folk, la soul, la pop. Un de ces disques qui changent tout. Propulsée par le single pétillant Mushaboom, elle passe des squats berlinois aux studios sur-éclairés de Taratata. D’un coup, Feist se voit comparée à Rickie Lee Jones, Billie Holiday ou Dionne Warwick. Des références qui auraient pu facilement lui faire tourner la tête, la faire s’aventurer sur des terres riches et ornementales qui n’étaient pas les siennes. Mais Feist n’a jamais oublié les leçons de Dry. Aussi intemporelle et classique qu’elle soit, sa musique refuse de toutes ses forces l’apparat, le superflu, le compromis. Dans ses moments les plus pétillants, graciles, elle garde ? et c’est ce qui la rend si bouleversante ? ce côté rugueux, dépouillé, jamais lisse.
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Son nouvel album, The Reminder, franchit un pas de plus dans ce dépouillement, cette volonté de passer la soul et le folk à l’épreuve du minimalisme. Pour l’enregistrer, elle s’est enfermée quelques semaines dans une bâtisse vieille de deux siècles, dans un petit village du Val-d’Oise, La Frette-sur-Seine, en compagnie des complices de toujours, Gonzales, Mocky, Jamie Lidell, et aussi du producteur Renaud Letang (Manu Chao, Jane Birkin’). Une expérience intense, faite d’engueulades, de discussions sans fin.
Le résultat, à l’instar du riff de piano infernal de My Moon My Man, premier single redoutable, qui évoque les meilleurs titres de Goldfrapp et enivre avec la légèreté des meilleurs millésimes, est à la hauteur des espérances. Feist virevolte entre pop, torch-song, gospel rock (la très réussie reprise de Sea Lion Woman popularisée par Nina Simone) et réussit, dans ce disque presque oppressant tant il est intense, habité, à reproduire la magie de Let It Die.
On est en 2007. Certains tentent de surfer sur la new-rave, mettent des polos fluo, d’autres se raccrochent au retour du rock. Feist se fout des modes, elle a choisi son camp depuis longtemps : l’éternité.
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