Et si le meilleur groupe de pop anglaise était aujourd’hui américain ? Réponse avec les Californiens de The Morning Benders.
Ça paraît couillon, mais on finirait presque par l’oublier : longtemps, la pop anglaise fut colonie exclusive des Anglais. Mais depuis quelques années, elle s’est rebellée et a proclamé son indépendance : on était allé trop loin dans le dogme avec Oasis et la britpop. Quelques-uns des meilleurs groupes de pop anglaise sont ainsi aujourd’hui américains. On pense notamment aux Violens, à School Of Seven Bells, aux Isles (et à des rues entières de Brooklyn).
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Sur un album qu’ils offraient sur le net en 2008 – The Bedroom Covers, recommandé –, les Morning Benders jouaient ainsi le grand écart entre leur moi américain (reprises de Roy Orbison, du Velvet, des Talking Heads…) et leur surmoi : un fantasme d’Angleterre symbolisé par des relectures étonnamment pieuses des Smiths ou de Fleetwood Mac.
Parmi les artistes revisités par les nonchalants Californiens, on est certain que deux l’étaient autant pour leur son que pour leurs chansons : les Ronettes de Phil Spector et les Beach Boys. Car le Big Echo du titre, c’est ce qu’on se prend en effet boomerang dans les oreilles enchantées quand on projette de telles pop-songs, tout en broderie et fil d’or, dans le mur du son.
Abusant moins des réverbérations de cathédrale que leurs concitoyens des Drums ou de The Pains Of Being Pure At Heart, les Morning Benders se servent des échos pour ajouter confusion, espace et mystère à des refrains qui passeraient très facilement le test de la guitare sèche. Excuses ou Promises, les deux beautés qui ouvrent cet album, sont ainsi littéralement déracinées du quotidien, comme propulsées dans le coton des rêves par ce son à la fois diabolique, enveloppant et chimérique.
En termes de grandeur et de démesure, on dépasse largement ici les limites riquiqui qu’impose plus généralement l’indie-pop. Ce qui n’est pas étonnant puisqu’un membre de Grizzly Bear est aux commandes de ce tapis volant. Comme chez les Local Natives ou les Freelance Whales, autres partisans d’une pop divorcée du réel et de la raison, les Morning Benders vivent retranchés, en communauté parfaitement innocente, dans des chansonsbulles qui font pschitt et pétiller la vie. Un morceau s’appelle Pleasure Sighs, “Soupirs de plaisir”. On demande l’autorisation de hurler.
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