Grande joie, The Go! Team revient : écoute en avant-première, et commentée, du nouvel album de la troupe zinzin.
On a un instant cru The Go! Team, troupe internationale formée par le génie sonique Ian Parton, perdue pour toujours. On a cru perdues les joies pures, enfantines, infinies et infiniment variables qu’apportaient ses tubes kaléidoscopiques, ses mélanges zinzins, ses rushs hip-pop, son électricité tectonique et ses concerts foufous, overdosés de bonheur.
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Mais The Go! Team, c’est heureux, n’était qu’en pause : la folle équipée revient le 30 mars avec un nouvel album, nommé The Scene Between et que Parton a d’abord composé et enregistré seul, comme il l’avait fait avec le premier et increvable Thunder, Lightning, Strike de 2004.
Puisque Parton l’a conçu seul, il connaît mieux les arcanes de chacun des morceaux de The Scene Between : l’album est est en écoute intégrale ici en avant-première, deux semaines avant sa sortie, accompagné d’un commentaire morceau par morceau de l’Anglais.
What D’You Say
Le morceau d’ouverture est une petite chanson californienne et amère de drone pop, à propos de quelqu’un qui veut repartir de zéro : « Tous ces étés que je n’ai pas eu, je les rattrape, toute les chances que je ne saisis jamais, je les rattrape maintenant”. Je suis allé en vacances sur la côte Pacifique dans un Winnebago (ndt : un gros camping car) il y a bout de temps, et je ne sais pas pourquoi mais j’ai toujours gardé en mémoire certains moments particuliers. Des photos constellées de halos lumineux, des parcs d’attraction abandonnés, moi tourneboulant dans les vagues. Plus que sur les trois précédents albums de The Go! Team, je voulais installer un sentiment cohérent –et je crois que la meilleure manière que j’ai trouvée pour décrire cette impression est un coup de soleil. J’aime l’idée qu’un album s’ouvre avec le bruit d’une canette de soda qu’on ouvre, car ça donne une image instantanée de ce qui suit.
The Scene Between
Je pense généralement à la musique en images, et j’avais pour cette chanson l’idée de quelqu’un survolant des paysages en observant le sol –des rivières, des forêts, des chœurs en train de chanter au sommet de montagnes. Mais je trouve aussi un petit air menaçant à cette idée, quelque chose d’un peu sectaire, à la Waco. Et il y a clairement une petite schizophrénie entre le couplet et le refrain. Comme si on passait soudainement de la campagne à la ville. J’aime toujours la tension qui existe entre l’agréable et le méchant.
Waking the Jet Stream
J’aime la manière dont celle-ci se tient précisément entre la gaieté et la tristesse –la chanson porte sur le côté répétitif du quotidien, est un peu contre cette sorte de course de rats, « Tout le monde dans le train du matin, le sentent-ils aussi »… Les harmonies du début ont été enregistrées sur un dictaphone ; j’aime beaucoup cette espèce de son de répondeur téléphonique.
Rolodex The Seasons
Chaque album de The Go! Team contient une interlude comme celle-ci, Super Triangle sur Rolling Blackouts ou My World sur Proof Of Youth par exemple. Pour Rodolex The Seasons, j’imaginais des marshmallows grillés sur un feu de camp, le time-lapse d’une année passée dans un parc national. Je crois que j’ai toujours été inspiré par les petits films pédagogiques, dans Sesame Street, qui t’apprenaient des trucs sur l’hibernation ou t’emmenaient visiter une usine de beurre de cacahuète… C’est ma version de ça.
Blowtorch
Je n’écris jamais les chansons de The Go! Team d’un coup –elles sont toujours constituées de 4 ou 5 idées séparées que je stocke dans ma tête pendant des siècles. J’écris les mélodies avec une simple guitare acoustique. Mais quand est venu le temps de l’enregistrement, j’ai eu l’idée de construire ce morceau à partir de plein de sources différentes –disons par exemple que l’accord en Sol est un sample d’une seconde d’une chanson, que celui en Ré est celui d’un titre totalement différent, et ainsi de suite. Le processus d’accumulation de tout ceci a fini par former un wall of sound. Combiné avec les voix du Sudden Ensemble et de Doreen Kirchner, ça a donné ce truc super mélodique un peu peste.
Did You Know
Sur celle-ci joue une fille chinoise nommée Atom, qui s’occupe de la batterie dans un groupe pékinois nommé Hedgehog. Ces trois syllabes répétées dans le refrain m’ont immédiatement suggéré les mots « did you know ». Il est ensuite devenu évident que la chanson porterait sur quelqu’un avouant quelque chose (« Savais-tu que je suis le trésor que tu ne peux pas trouver ? »), et pour une raison que je ne pourrais expliquer, j’ai imaginé que la confession se déroulerait au téléphone. Je savais que je voulais quelqu’un chantant avec un accent, je voulais donner un côté un peu Mo Tucker au titre, et être certain qu’il ne serait pas sur-chanté ou trop sentimental. J’aime toujours les choses qui flirtent avec l’amateurisme.
Gaffa Tape Bikini
C’est une idée qui vient d’une cassette vieille de 20 ans que j’ai récemment redécouverte. Quelque chose enregistré en 1992 sur un sampler un peu bancal. Cette cassette à partir de laquelle j’ai travaillé était la troisième copie de l’originale, et sonnait vraiment de manière distordue et bizarre. J’adore les chansons-interludes, je m’imagine très bien faire un album ne comportant que des morceaux d’une minute –j’ai toujours été intéressé par le concept du zapping.
Catch Me on the Rebound
C’est probablement la chanson la plus pop de l’album, j’imaginais une riot grrl rencontrant une chanson de la Motown. J’ai toujours des sentiments un peu mêlés à propos de l’aspect accrocheur d’un morceau : je suis conscient que The Go! Team est un groupe de l’entre-deux et que les mélodies pourraient le faire sombrer dans l’écœurant, je dois donc en permanence m’éloigner de ce risque.
The Floating Felt Tip
Il y a quelques temps, j’ai commandé sur eBay une dizaine de VHS de publicités américaines des années 70 et 80, et une chanson de l’une d’entre elles m’a sauté au visage –j’ai ajouté un peu de distorsion et l’ai ralentie pour que le chanteur semble plus vieux. Des VHS branlantes et une impression de zapper continuellement sur le câble constituent une sorte de thème esthétique pour cet album.
Her Last Wave
Cette chanson porte sur les derniers mots d’une surfeuse alors qu’elle est en train de se noyer en mer –« Me retournant, me retournant encore et encore ». J’imagine que c’est ce que The Go! Team a fait de plus proche du shoegazing, mais j’aime penser qu’il y a quelque chose d’un peu « Go! Teamy » en toute chose. Le son du groupe est assez large, il peut aller de chansons de fanfares à des orchestrations à la Wichita Lineman, mais j’espère qu’il y a quelque chose de reconnaissable dans tout ça.
The Art of Getting By
J’ai presque imaginé cette chanson comme un genre nouveau : le space gospel. J’aime l’idée de deux choses qui se combinent. J’avais en tête l’idée d’une chanson sur la secte Heaven’s Gate. C’est un culte de la fin des années 90, avec la croyance que tous quitteraient la terre dans un vaisseau spatial caché derrière une comète et transportant Jésus. Ils se sont finalement collectivement suicidés. Et cette chanson pourrait finalement presque être l’hymne qui serait joué lors de leur ascension hors de l’atmosphère. Elle est jubilatoire et triomphante, mais dès qu’on y pense sous cet angle, l’impression devient beaucoup plus étrange.
Reason Left To Destroy
Cet album est plus écrit, il traite plus de sujets que les autres disques de The Go! Team, dont les paroles tenaient plus du slogan. Cette dernière chanson s’inspire des Oiseaux de Hitchcock. J’ai visité Bodega Bay, l’endroit où le film a été tourné, où l’ambiance est restée étrange, brumeuse. J’ai aimé l’idée d’un individu arrivant dans une petite ville et y semant le trouble –les premiers mots, « Taking the cage over to Bodega Bay » sont une référence directe au film.
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