Loin de la reformation canaille des Sex Pistols, l’esprit du punk-rock est vivant, irlandais et incandescent. Il eût été si simple de conclure en trois mots, de refermer sur Compulsion la porte du cagibi où croupissent les babioles du revival punk. Mais voilà que les petites teignes se mettent à cumuler l’ambition et le talent. […]
Loin de la reformation canaille des Sex Pistols, l’esprit du punk-rock est vivant, irlandais et incandescent.
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Il eût été si simple de conclure en trois mots, de refermer sur Compulsion la porte du cagibi où croupissent les babioles du revival punk. Mais voilà que les petites teignes se mettent à cumuler l’ambition et le talent. De cette Irlande qui les a vus naître, ils ont l’imagination chaleureuse. De l’Angleterre, ce trampoline adoptif en vue d’une conquête du monde, ils cultivent la retenue et le coup de rein hautain. A l’instar d’autres Ned’s Atomic Dustbin ou Teenage Fanclub, Compulsion navigue entre bruit décalé et agitation au pied de la lettre. Nous les attendions radicaux, nous les découvrons radicalement différents, capables de dompter l’énergie pour en décupler l’efficacité. Sous leurs guitares faussement brouillonnes se profile l’ombre d’un gouvernail de premier ordre, solide, inflexible, même lorsque gronde le tonnerre de Juvenile scene detective ou Western culture collector, hymnes éventuels et arbitrairement extraits d’un orage dense. Si les mots de Josephmary, débités en tranches de power-punk égratigné, semblent surfer sur les rouleaux binaires, c’est pour mieux y puiser le swing des ressacs. Comme une tique distraitement plantée sur la couenne d’un chien fou, en n’opposant qu’une morgue relative aux éclairs instrumentaux, le chant attise les nerfs à vif de chansons déjà crispées. Quatre ans après son premier Comforter, Compulsion revient en véritable sauveur d’une vague dont il n’a cure. Comme une réminiscence compacte et britannique du Doolittle des Pixies, volontiers pesant (Happy monsters), facilement pop (Question time for the proles), The Future is medium confère enfin un authentique intérêt au non-événement de la recrudescence destroy. En quelques emprunts et beaucoup de conviction, en moins de temps qu’il ne leur en faut pour accélérer un tempo, les trois Dublinois et leur batteur hollandais mettent tout le monde d’accord et raflent la mise. Le punk-rock en 1996 sera compulsif ou réintégrera le musée.
Jean-Luc Manet
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