On aime beaucoup, beaucoup beaucoup beaucoup les Californiens Dodos. Avant la chronique, on présente donc ici leur magnifique Time to Die en une grosse poignée de morceaux piqués sur YouTube, et le groupe explique ses idées passionnantes dans une longue interview.
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INTERVIEW
[attachment id=298]Comment vous sentez-vous ?
Meric : Plutôt bien. J’ai l’impression que cette tournée est différente de toutes nos précédentes tournées. L’esprit, le rythme sont différents. C’est notre première véritable tournée depuis pas mal de temps ; et je me rends compte qu’on a beaucoup appris des précédents circuits. On a appris à maîtriser notre rythme, et le rythme des individus, dans une tournée, est je pense assez central. Je suis excité, et à l’aise.
Comment vous décririez-vous, en tant qu’individus, en tant que groupe ?
Je crois que la meilleure manière de nous décrire est de dire que nous sommes de gros, très gros travailleurs. On bosse dur, et en permanence. Et je m’en rends compte de plus en plus clairement. On fonctionne mieux sous la pression. Je ne sais pas ce qui en moi impulse cette éthique du travaille, mais quand on ne fait rien, je me sens inutile, je me délite. Et je parle de travailler au sens large : ce n’est pas nécessairement musical, j’adore déménager des trucs par exemple, je transporte mes propres instruments, je ne me sens pas à l’aise quand je vois d’autres gens en faire trop pour moi.
Que peux-tu me dire de l’histoire du groupe ? Comment vous êtes vous rencontrés, quels étaient vos points communs, les idées sur lesquelles vous vous retrouviez ?
Nous nous sommes rencontrés via mon colocataire –qui était en fait le cousin de Logan. Je jouais déjà de mon côté, tout seul, depuis quelques années. Mais on s’est immédiatement mis à travailler ensemble. Je pense que notre approche du groupe, de notre son, que les directions que nous avons prises sont venus d’une envie de jouer des choses violentes, énergiques. Mais à l’époque j’écrivais plutôt des choses acoustiques, je me limitais à ça, simplement pour des raisons pratiques : je ne pouvais me payer beaucoup d’équipement, trouver un endroit pour répéter, des gens avec qui jouer. Je devais aller au plus simple, et tout était basé sur la guitare acoustique, et ma manière de jouer, en finger picking. Nous nous sommes construits sur cette base : une approche très percussive de la musique, mais sans nous séparer de ma base acoustique. Je n’ai pas nécessairement l’impression que notre musique est foncièrement différente de celle que font d’autres groupes, mais je pense que notre approche est très spécifique. Elle est unique, je pense.
Les choses sont venues naturellement ?
Il y avait clairement une idée vers laquelle je tendais déjà avant que Logan n’arrive. Et quand il m’a rejoint, ça a créé l’espace créatif pour la mettre en place, ça nous a permis de la mettre en application. Nous avons trouvé notre propre truc en jouant ensemble pendant des heures, mais les choses préexistaient, d’une certaine manière. Mais notre son n’est pas défini, une fois pour toute : j’ai l’impression qu’il change en permanence, d’album en album, d’année en année.
Cette évolution permanente est un besoin, ou est-il naturel ?
C’est pour moi un besoin naturel. Chaque disque est d’une certaine manière une réaction au précédent, à ce qu’on faisait avant. Je parle pour moi, mais je me sens sale et inutile si je refais encore et encore la même chose.
Logan : Même si le résultat final est reconnaissable comme étant l’œuvre des Dodos, même si quelqu’un qui a écouté notre précédent album peut se dire qu’on continue dans la même veine, quand nous faisons les choses, nous avons en permanence de nouvelles choses en tête, des étapes qu’on cherche à franchir. Même quand ça sonne similaire, ce qui est naturel et bon puisque ça vient quand même des mêmes esprits, nous avions des idées nouvelles sur lesquelles nous essayions de nous concentrer.
Musicalement parlant, quand vous avez commencé, aviez-vous un modèle, une inspiration particulière ? Vous avez souvent été comparés à Animal Collective, par exemple…
Meric : J’adore ce groupe, je pense que ce qu’ils ont réussi à faire est génial, que c’est sans doute l’un des groupes contemporains les plus importants, sinon le plus important –ils font passer des idées incroyables dans une musique plutôt accessible. Mais pour nous, il n’y a pas eu de groupe en particulier, notre inspiration est sans doute plutôt une association de plusieurs groupes. Je dis souvent qu’on a essayé de mélanger John Fahey et Tool ; ça ressemble à une blague, mais ce n’en est pas tout à fait une. Bon, on n’a pas écouté l’un et l’autre en se disant « bon, ok, prenons cette partie de l’un, et collons-la à ce bout de l’autre »… (rires)
Logan : De la même manière, quand on me pose la question, je cite souvent deux groupes. John Fahey, comme Meric, mais plutôt que Tool je mentionne Andrew WK…
Et San Francisco ? Est-ce une influence importante pour vous, pour votre musique ?
Logan : Musicalement, ce ne serait peut-être pas si différent, mais les paroles, elles, ne seraient sans doute pas les mêmes…
Meric : Il y a dans mes textes beaucoup de références à la Bay Area, des coins où on vit, où on passe du temps. Je pensais à ça récemment, parce que John Smith, un guitariste soul qui monte une compilation réservée aux musiciens de la Bay Area, m’a demandé de participer. On en a parlé, en se demandant s’il y avait une sorte de communauté de musiciens autour de San Francisco, si la ville et ses alentours impactait ou non notre manière de faire les choses. Et je n’en suis pas certain, parce que je n’ai jamais vécu ailleurs qu’à San Francisco, mais la ville est une ville-destination, les gens déménagent pour s’y installer, on n’y entend personne dire « J’ai tellement hâte de partir d’ici »… Et j’imagine que la topographie des lieux, les paysages, la manière dont tout est agencé peut avoir un impact sur la création ; tout est spacieux, ouvert, il y a des collines, des montagnes, la mer. Tout cela offre peut-être une sorte de sentiment de possibilités et d’espoir à ceux qui y vivent et y créent.
Et avez-vous l’impression de faire part d’une certaine tradition musicale San Franciscaine ?
Logan : Je réponds souvent non à cette question. Mais je me rends compte, quand on rentre chez nous, qu’on peut jouer des concerts d’une manière plus cool, moins organisée, et qu’il y a quand même une certaine communauté à laquelle on appartient. C’est un sentiment assez nouveau. L’impression de rendre hommage à notre ville quand on y joue. Mais avant cela, on y avait certes une petite réputation, mais on est rapidement partis en tournée ; on ne peut donc pas, dans ces conditions, avoir l’impression particulière d’attachement que je ressens un peu plus clairement désormais.
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