Les Sud-Africains de Die Antwoord révèlent l’envers d’un pays hanté par son passé. Critique et écoute.
Décidemment, la séduction dérangeante des clips du duo sud-africain Die Antwoord ne laisse pas d’intriguer. Sur les plus récents, Fok Julle Naaiers et I Fink U Freeky, deux extraits de leur nouvel album Ten$ion, l’inquiétant Ninja et la spectrale Yo-Landi croupissent en noir et blanc dans des recoins sordides où personne ne souhaiterait s’attarder. Pas seulement parce qu’il y grouille des vers, des scorpions et des tarentules mais parce que Ninja, avec sa tête de forcené sorti de taule le matin même, s’en met plein la bouche ou en recouvre son corps tatoué. Sans parler des personnages à l’allure de demeurés qui ddéfilent comme pour le casting d’un remake sud-africain du Freaks de Tod Browning. Pas étonnant que ce tordu de David Lynch soit devenu un fan déclaré des rappeurs du Cap.
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Si Eminem révèle à sa façon perverse l’envers white trash de l’Amérique, comptez sur Die Antwoord pour promouvoir celui bien glauque, bien flippant, d’une Rainbow Nation tentant en vain de refouler son passé ségrégationniste. Car même chantés pour partie dans cet afrikaans incompréhensible, leurs flows portent une sorte de zèle primitif ainsi qu’une hostilité assez conforme avec les statistiques qui font du Cap ll’une des cinq villes les plus violentes au monde.
Au fond, qu’importe que l’authenticité de ce qu’ils sont censés représenter – la frange ultrapauvre des Blancs d’Afrique du Sud – soit remise en question. Spoek Mathambo, un autre rappeur du Cap qui les connaît bien, affirme que Ninja et Yo-Landi viennent en réalité d’un milieu aisé et qu’ils jouent aux Blancs déshérités pour mieux s’approprier leur culture. Quelle importance ? L’essentiel est qu’ils continuent à générer du plaisir avec leurs trucs horribles.
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