Parler de ce T-Bone Guarnerius comme du premier album solo de Vincent Segal tient de la douce ironie. Car ce violoncelliste mutant, qui a su accompagner des artistes aussi différents que Cesaria Evora, Blackalicious ou M et constitue la moitié du turbulent duo Bumcello (l’autre est le batteur Cyril Atef, tout aussi impressionnant de polyvalence), […]
Parler de ce T-Bone Guarnerius comme du premier album solo de Vincent Segal tient de la douce ironie. Car ce violoncelliste mutant, qui a su accompagner des artistes aussi différents que Cesaria Evora, Blackalicious ou M et constitue la moitié du turbulent duo Bumcello (l’autre est le batteur Cyril Atef, tout aussi impressionnant de polyvalence), ne conçoit pas la musique comme une course en solitaire.
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Derrière ce disque, qui illustre les péripéties de son double fantasmé T-Bone Guarnerius, bluesman cosmopolite, on retrouve assurément ce goût de l’aventure, de la mise en danger constante. Alors qu’il aurait pu décider de rester le seul maître à bord et mener sagement sa barque jusqu’à des rives attendues, il a choisi d’inviter des amis (Magic Malik, le guitariste tout-terrain Sébastien Martel) ou d’anciens mentors (le tromboniste Glenn Ferris) à prendre avec lui le grand large.
Globe-trotter et musicologue, le Français est tellement habitué, lui, à s’acclimater à tous les milieux que son album, zapping transculturel et langoureux, respire la spontanéité. Avec fluidité, il enchaîne une sensible ballade de funambule exécutée avec Piers Faccini (Circle around), une reprise désossée et électrique d’Under My Thumb ou, guidé par Mama Ohandja, une chanson funéraire camerounaise (Nnomo Nga Wono). Egalement épris de hors-piste, il conçoit de drôles d’instrumentaux qui étrennent un très envoûtant dub électro-acoustique (Mercurial Gramofon, T-Bone Guarnerius).
Car Segal n’établit pas de hiérarchie dans ses plaisirs, ne réalise aucun nivellement des genres, préférant leur cohabitation pacifique à l’établissement de bornes. Chaque morceau a été traité de la même lumineuse manière, c’est-à-dire enregistré sur Nagra, ce gros magnétophone à bande longtemps porté par les reporters radio, dans des endroits naturellement chargés en atmosphère (une chapelle paumée vers le cap Fréhel, au bord du périphérique ou dans la maison de certains participants). Saisie ainsi en dehors du cadre imposé du studio, cette musique polygame sonne éternellement vivante, charnelle.
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