L’un des musiciens les plus passionnants de l’electro contemporaine s’inspire de Bergman avec volupté.
Première signature du label Erased Tapes il y a dix ans, le Londonien Ryan Lee West, alias Rival Consoles, aura joui d’une exposition moindre que ses futurs collègues de bureau Nils Frahm ou Ólafur Arnalds. Ses albums et ep, publiés en flux tendus depuis l’inaugural The Decadent en 2007, constituent pourtant l’une des fresques les plus impressionnantes des musiques électroniques contemporaines, imprégnées de toutes parts de cette chaleur organique qui fascine celui qui est à l’origine un guitariste, et qui avoue « avoir passé plus de temps dans sa jeunesse à jouer dans des groupes qu’à fréquenter des artistes electro. »
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Une musique perpétuel tiraillement
Admirateur de Trent Reznor de Nine Inch Nails, il a conservé de l’initiation au son pulsatif de l’Américain ce goût des fusions radicales entre le charnel et l’industriel, ses recherches obtuses n’étant jamais dénuées d’une certaine beauté convulsive dont le nouvel album est une nouvelle fois perclus. À l’origine de Persona, il y a le film du même nom d’Ingmar Bergman, et notamment cette image du générique où un gamin se précipite sur un écran pour toucher le visage d’une femme en gros plan. De cette étreinte contrariée, du rapport d’échelle à la fois doux et monstrueux de ce plan bouleversant, West a décliné une bande-son étourdissante, qui sur le morceau-titre prend la forme d’un haletant travelling techno, parcouru de spasmes dub et parasité par des striures métalliques.
La référence à Bergman, cinéaste sensuel ET métaphysique, ne pouvait mieux coller à cette musique elle-même en perpétuel tiraillement, produite on l’imagine dans un fiévreux corps-à-corps avec des instruments qui sous leurs aspects de monstres froids se révèlent des volcans torrides, humides, voluptueux.
Après le mini-album Night Melody il y a deux ans, Rival Consoles se donne ici beaucoup plus d’espace pour la modélisation d’un son riche de mille influences, du post-shoegaze (le titre Hidden a été composé après avoir vu Slowdive sur scène) aux rêveries ambient qui le rapprochent de Nils Frahm (Untravel). Bref, Persona est parfait.
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