Le chanteur anglais était le premier à faire résonner la musique dans l’enceinte du Bataclan depuis les attaques de 13 novembre. Alors qu’en février à l’Olympia, les Eagles of Death Metal avaient livré un concert-hommage, Sting a offert un vrai live, histoire de faire renaître la musique comme il se doit.
19 heures, hier soir, boulevard Voltaire. Alors que le périmètre de sécurité autour du Bataclan s’élargit à vue d’œil, que les forces de l’ordre se font des plus en plus nombreuses, les quelques personnes ayant réussi à obtenir leur place pour le concert de Sting se massent à cent mètres de la salle. Un jeune homme, ému, transmet un bouquet de roses rouges à une femme : « Pourriez-vous les déposer devant le Bataclan, s’il vous plaît ? Je ne peux pas y aller... »
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Rien n’a changé
Les scènes semblables sont nombreuses, l’ambiance est étrange. On trouve dans la foule des fans de Sting, dont on sent qu’ils auraient pris leur billet peu importe la portée de l’événement. Et bien sûr, des familles de victimes, des proches de victimes, des victimes. Alors que le concert des Eagles of Death Metal à l’Olympia en février dernier procurait une ambiance lourde, pesante, à l’effet cathartique et rock’n’roll, ce soir, il y a plus de sourires et de décontraction. Même si ça ne doit pas être le cas pour tout le monde.
PHILIPPE LOPEZ / AFP
Les quatre barrages de sécurité franchis, les spectateurs pénètrent dans le couloir d’entrée du Bataclan, avec son vestiaire à droite. Là, tout le monde prend la mesure de l’endroit où il se trouve. Il y a un an, la musique était interrompue net par le bruit des kalachnikovs. Arrivé dans la salle, premier constat, et pas des moindres : rien n’a changé. La disposition de la salle est la même, la décoration aussi, les fameuses peintures qui bordent la fosse sont là, sans parvenir à savoir si elles sont intactes ou non. C’est le genre de détails auxquels on ne faisait pas attention il y a encore un an.
Les fameuses peintures qui bordent la fosse du #bataclan sont fidèles au poste. pic.twitter.com/9LsDz0NNWJ
— Brice Miclet (@Brice_Miclet) 12 novembre 2016
Marc, lui, a scruté la salle: « On est venus voir pleins de concerts mythiques ici. Ils n’ont rien changé à la salle, on sent une vraie continuité. C’est bien. On n’arrête pas comme ça. On connaît le Bataclan, mais quand on voit le huis-clos que c’est, ça fait froid dans le dos. Et le fait que Sting soit programmé, c’est aussi dans la continuité des grandes heures du Bataclan ».
« Il n’y a rien à tirer de la violence«
Après une heure d’attente, Sting entre sur scène. Il commence par un discours en français: « En rouvrant le Bataclan, nous avons deux tâches à accomplir : d’abord, se souvenir et honorer ceux qui ont perdu la vie dans les attaques il y a un an. Et puis, célébrer la vie et la musique que cette salle historique représente« .
S’ensuit une minute de silence parfaitement respectée. Puis la musique reprend ses droits. Le trompettiste franco-libanais Ibrahim Maalouf est présent sur scène, il y restera plus d’une heure. Sting avait prévenu : il allait commencer son live avec le titre Fragile : « Quelque chose dans ton esprit restera à jamais / Peut-être que ce dernier acte était fait / Pour trouver l’argument final / Disant qu’il n’y a rien à tirer de la violence et que rien ne s’évapore jamais« .
AFP PHOTO /BORIS ALLIN/HANS LUCAS
Le public improvise une chaîne humaine en se prenant les mains par les mains #Bataclan #Sting pic.twitter.com/yQ7itj9ChC
— Steven Bellery (@StevenBellery) 12 novembre 2016
Ensuite, c’est Message In A Bottle, hit mondial de The Police, qui retentit et fait passer cette soirée de commémoration à véritable concert. Peu de choses rappelleront les attentats du 13 novembre 2015. Sting a fait le choix de livrer un live et non un hommage. « Je viens pour un concert, pour voir Sting, que je n’avais jamais vu, explique Thibaut, après, je fais beaucoup de concerts, donc c’est important d’être là ce soir pour voir quelque chose de vivant. Mais depuis que je suis rentré, j’imagine vraiment ce que les victimes ont vécu. On regarde les sorties de secours, premier réflexe. Ça peut être effrayant, mais il me faut passer au-dessus de ça« .
Des symboles qui pèsent
Walking On The Moon, So Lonely, Englishman In New York, Every Breath You Take… Tous les tubes y passent. A un moment, tout de même, il prend la parole et lance un « Inch’Allah » en expliquant « C’est un mot superbe, fait d’humilité et d’espoir« . Il entonne ensuite Désert rose, qu’il a sorti en duo avec Cheb Mami en 1999. Un titre en arabe et en anglais, lourd de sens. Les symboles sont là. Sting attend la fin du show pour offrir Roxanne à ses fans. Puis, projetée derrière lui, l’image du journaliste James Foley apparaît : le chanteur a écrit le titre The Empty Chair en l’hommage de ce jeune journaliste exécuté par l’Etat Islamique en août 2014. Il la dédie à toutes les victimes du terrorisme. Fin du concert. La Bataclan a ressuscité, mais il reste bien des plaies à panser.
{"type":"Banniere-Basse"}