Le quatrième album de Tortoise, Standards débute par une longue déflagration de guitares souillées et de cymbales mêlées en un roulement abrasif, qui monte, tournoie et s’élève pour retomber aussitôt. L’espace d’un instant, on a l’impression d’être pris au milieu d’une envolée de Coltrane : Tortoise déferle ici, à poil, sans autre souci de forme, […]
Le quatrième album de Tortoise, Standards débute par une longue déflagration de guitares souillées et de cymbales mêlées en un roulement abrasif, qui monte, tournoie et s’élève pour retomber aussitôt. L’espace d’un instant, on a l’impression d’être pris au milieu d’une envolée de Coltrane : Tortoise déferle ici, à poil, sans autre souci de forme, débordant d’énergie. Suit un mouvement tout différent, d’où surnagent quelques grondements organiques : une mélodie naïve et un rythme se superposent et tournent en boucle, soutenus par des échos lointains et des petits bruits agglutinés. Standards craque de soubresauts furtifs et d’harmonies inattendues, qui se croisent pour constituer une matière musicale riche et complexe. Sur les albums précédents, Tortoise laissait deviner tous ses penchants électroniques, à travers quelques ruptures stylistiques surprenantes mais toutes pleines de sens. Standards donne ici l’impression que le groupe a relégué au garage le collage de bandes et l’addition des influences, au profit d’une stratification à la densité inédite. Chaque moment de cet album ressemble à une multiplicité de couches musicales, d’idées superposées, jouées en même temps, au même moment. Loin du jansénisme habituel du groupe et de sa quasi-perfection instrumentale, sans doute un tantinet épuisante, Standards révèle un groupe en plein débordement de lui-même, pris entre ses idées multiples, qu’il tente de faire vivre et cohabiter.
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