Andrew Bird retrouve les hautes sphères de son inspiration mélodique dans un éclatant recueil d’inédits et de reprises.
La vie n’est pas toujours facile aux génies : car ils ont des devoirs élevés, dont les médiocres sont naturellement dispensés. Chez un tâcheron de base, le moindre fléchissement d’inspiration passera inaperçu et ne défrisera personne ; alors que chez un musicien abonné à l’excellence, il sera aussitôt repéré, étudié sous tous les angles et interprété comme une possible marque de déclin. L’an passé, on crut ainsi qu’Andrew Bird, propulsé sur les plus hautes marches du songwriting américain grâce à ses albums Weather Systems et The Mysterious Production of Eggs, montrait pour la première fois des signes d’essoufflement.
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Son dernier disque, Armchair Apocrypha, était impeccablement enregistré, joué et chanté. Mais un léger relâchement mélodique ici, deux ou trois petites facilités harmoniques là, avaient instillé le doute : la plume de Bird semblait un peu moins fringante. Dans les concerts qu’il livra à l’automne dernier, l’Américain se chargea de clouer le bec des chipoteurs en administrant de magistrales leçons de majesté, de clarté et de fraîcheur. Aujourd’hui, il prolonge cette mise au point avec Soldier on, dont la concision (huit titres, trente-cinq minutes) accentue l’implacable splendeur.
Vendu lors de sa dernière tournée et désormais disponible sur le site du label Fargo, ce panier garni d’inédits, de versions alternatives (Plasticities et Heretics, présentées ici dans des arrangements court-vêtus de toute beauté) et de reprises (Oh Sister de Dylan et un superbe incunable de 1918, repêché dans les greniers du patrimoine américain), est plus qu’une simple friandise. C’est un menu de premier choix qui, de la mélodie longue en bouche de The Trees Were Mistaken, montée en neige par une rythmique presque jungle, aux textures onctueuses de The Water Jet Silice et Sic of Elephants, rappelle à quel point Andrew Bird a rehaussé les saveurs du songwriting à l’américaine.
Son lyrisme vocal net et sans bavures, sa juste virtuosité, son langage aussi ample que précis et sa mémoire longue ont mis fin à des années de frilosité indé et de paupérisme lo-fi. Ceux qui s’obstinent à parquer sa musique dans les enclos du folk ou de la pop devraient vraiment faire réviser leur sonotone : véritable roi des airs, Bird plane bel et bien au-dessus de toutes les mêlées.
Album uniquement disponible sur www.fargostore.com
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