Parfois, on nous demande des choses comme “Quels seraient les dix disques que vous emporteriez sur une île déserte ?” comme si Mick Jagger ou Marlon Brando allaient un jour nous inviter sur leurs îles privées. On répondra pourtant : seulement celui des Avalanches, Since I left you. Le seul au monde à englober tous […]
Parfois, on nous demande des choses comme « Quels seraient les dix disques que vous emporteriez sur une île déserte ? »
comme si Mick Jagger ou Marlon Brando allaient un jour nous inviter sur leurs îles privées. On répondra pourtant : seulement celui des Avalanches, Since I left you. Le seul au monde à englober tous les autres. Dans Avalanches, il y a « avalanche », et c’est ce que cette musique a fait dans les dizaines de milliers de disques qui lui ont donné vie : une descente violente, laissant dans son sillage un paysage remodelé, des corps à peine reconnaissables de musiques recensées, détruits et restructurés sous la violence du choc. Qu’on ne s’étonne donc pas de retrouver, dans le même morceau, les jambes agiles de Kid Creole greffées au hasard sur le corps de Basement Jaxx.
Comme beaucoup d’entre nous, irrécupérables maniaques, les Avalanches passèrent des années à lire les disques autant qu’à les écouter, repérant chaque nom, chaque pièce d’un puzzle qui prendra finalement dix années à se construire. Car Since I left you a beau être l’un des disques les plus euphorisants et chic de l’époque, sa longue conception ressemble à l’un de ces clubs tristes (philatélie ou numismatique) où des garçons seuls comparent leur dérisoire érudition.
Mais l’incompétence miraculeusement préservée des premiers jours noisy-approximatifs est la force vive de l’enchevêtrement dingue de Since I left you. Alors que l’album aurait pu virer à la démonstration sportive ou à l’exercice de style frimeur, ce capharnaüm séduit justement par le désordre de son désordre.
Avec leurs airs de gentils branlotins, de slackers éduqués à l’école bad boy des Beastie Boys, The Avalanches imposent pourtant, sur Since I left you, un véritable génie de producteurs.
Comme dans un générique de péplum, ils pourraient afficher « Neuf cents samples ont été nécessaires à la réalisation de ce disque », mais le propos n’est pas tant l’exploit technique que l’humilité et la fluidité miraculeuses du résultat. Voici enfin le premier grand album écologique de l’histoire, qui recycle cent pour cent de sa musique et ne produit pas une seule nouvelle note polluante ? et donc idéal pour une île déserte. Dominique Voynet devrait se pencher sur les Avalanches.
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