Silicon

Avec un CV aussi solide que le sien (compagnon de rock lycéen des futurs Air ou Gopher, dandy chic d’Ollano et compositeur atypique pour le film Tokyo Eyes), Xavier Jamaux aurait pu se contenter d’un petit emploi stable et sans risque dans l’electro-chic française, composer au kilomètre pour le cinéma, les bars pouilleux de la jet-set ou la publicité. Oui mais voilà : Jamaux a développé une profonde allergie aux pages glacées. Et des poussées dœurticaire, il en fait de spectaculaires sur ce second album : « Je me fiche de Gucci, je me fiche de Prada, je me fiche des DJ, je me fiche d’être branché, je me fiche de la mode  » Une férocité de ton d’autant plus dérangeante que ces attaques, en bancs serrés de mots-requins, se déroulent sur une mer d’huile, en plein soleil. En dissimulant ses idées noires au sein d’une soul opulente et nonchalante, d’une électronique languide et raffinée, Jamaux créé ainsi un décalage de plus en plus troublant. Surtout que la musique, elle aussi, dérape volontiers à l’occasion, allant encanailler son electro-pop dandy du côté des constructions baroques d’un John Barry ou de robots kraftwerkiens aux articulations soudain parfaitement lubrifiées.

            {"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
          

Malgré quelques laiderons trip-hopards (Stranger at Your Side ou Sorrow Superhero), rarement en France, depuis Daho, ce vieux fantasme de musique électronique à la fois exigeante et accessible, snob et pourtant populaire, n’aura trouvé incarnation aussi digne. Car on le sent, Jamaux a appris la musique avant tout au cinéma (Auntie Aviator ou l’excellent Don’t Sit under the Apple Tree?). Un terrain de jeu où, de Carpenter à Moroder, le match souvent ailleurs vaniteux entre variété et têtes chercheuses a régulièrement fini sur un score de parité et en chaudes étreintes.