“Agætis Byrjun”, l’album fondateur des Islandais, fête ses vingt ans et s’offre une réédition luxueuse avec démos et inédits à la pelle.
“Un bon début”. En islandais, cela donne Agætis Byrjun, et c’est le constat qu’aurait dressé un proche de Sigur Rós à l’écoute du premier morceau composé pour le disque qui devait bientôt faire changer le groupe de dimension. Moins organique et moins brumeux que l’inaugural Von (1997), Agætis Byrjun bénéficie en plus de la production aboutie de Ken Thomas, maître ès expérimentations, de l’arrivée aux synthétiseurs, primordiaux, de Kjartan Sveinsson, et de la maturité nécessaire à la conception de ces œuvres définitives.
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Comprendre que la musique gravée dans le marbre entre août 1998 et avril 1999, mélange chatoyant de post-rock, d’ambient et de dream-pop, emporte ici tout sur son passage alors même que la plupart des morceaux étalent leurs atmosphères planantes pendant de longues minutes. C’est sans doute ce fabuleux contraste, ce précieux équilibre entre progressions majestueuses et quintessence de mélodies d’une beauté rare qui ont permis à Agætis Byrjun de traverser le temps pour se réécouter aujourd’hui comme au premier jour.
Un groupe prêt à conquérir le monde
Comment oublier en effet Svefn-g-englar, impressionnante cathédrale propulsée dans la stratosphère par la voix androgyne de Jónsi Birgisson et sa guitare jouée à la manière d’un violoncelle, le lyrisme poignant de Viðrar vel til loftárása, les cuivres en liberté emballant le final de Ný Batterí ou la chanson-titre, vibrante et lumineuse ballade que n’aurait pas reniée Radiohead ?
Vingt ans après ce choc initial, Agætis Byrjun nous revient dans un luxueux coffret de sept vinyles (ou quatre CD) agrémentés d’un livret de 84 pages. L’occasion de découvrir divers memorabilia puisés dans les archives : partitions, notes manuscrites, couvertures de magazines ou clichés des quatre garçons emmitouflés de la tête aux pieds pour se protéger de la froidure islandaise, tout ici nous ramène à une époque où Jónsi, Georg, Kjartan et Agúst travaillaient de jour pour gagner de quoi payer les sessions nocturnes en studio.
Quant à la musique, cette réédition gâte l’amateur, donnant à entendre pour la première fois en intégralité depuis sa diffusion sur les ondes de la radio RÁS le concert donné pour la sortie de l’album à l’Opéra de Reykjavík, le 12 juin 1999. Une heure et demie de musique parfaitement conservée qui témoigne d’un groupe au sommet de son art devant un public subjugué. Sigur Rós dévoile aussi démos et versions alternatives de chaque titre, ajoutant pour notre plus grand plaisir quelques inédits, dont ces Hugmynd 1 et 3 et leurs furieuses ambiances post-rock et trip-hop à même de nous faire adorer les bains de minuit dans les eaux glacées de l’Atlantique nord.
Mais la vraie perle est sans doute ce Debata Mandire capté live en 1999 : cette prière à deux voix interprétée par Jónsi et Kjartan, à mille lieues de la sophistication habituelle, met en lumière un groupe en apesanteur, prêt à conquérir le monde.
Agætis Byrjun – A Good Beginning (20th Anniversary Edition) (Ada/Warner)
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