King Krule a littéralement retourné Paris dimanche soir.
20 heures, la nuit est tombée sur la capitale. Sur un trottoir de la rue de Clichy, quelques courageux bravent le froid, fument leurs cigarettes et finissent leurs canettes de bière. Une voiture de police traîne dans le coin, ses occupants observent la foule d’un œil méfiant et fouillent vaguement quelques kids avant de repartir, sans succès. Ce dimanche, 1500 personnes ont décidé de sacrifier les ondes de leur radiateur et le Monaco-PSG pour écouter King Krule au Casino de Paris.
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Une fois entré dans l’enceinte du bâtiment, pas de grande surprise : l’âge moyen du public oscille autour de 25 ans. On se doute donc que chacun a grandi en écoutant le premier album d’Archy Marshall, paru en 2013. Désormais, les poils de barbe ont – un peu – poussé et le jeune Anglais a sorti The Ooz, qu’il s’apprête à défendre sur scène. On rate avec regret la première partie du concert, Horsey, pour cause de foule au bar ; et c’est donc directement King Krule qui nous accueille sans un bonjour, ni un merci.
Sa fidèle Mustang au poing, le chanteur lance Has this Hit?. Si la balance du son est parfaite, si la voix et les musiciens sont excellents, le concert a un peu de mal à se lancer. Il faudra attendre le troisième morceau (donc pas très longtemps) pour que la tuerie Dum Surfer fasse décoller le set. Entre ses relents punk et bossa-nova, ses éclats de saxophone et ses transitions modulaires, la chanson met tout le monde d’accord. Archy Marshall semble n’avoir jamais été aussi impliqué, aussi habité que ce soir. Arpentant la scène et crachant dans son micro, le musicien danse, titube, agite brusquement sa guitare. Son groupe le suit sans aucune fausse note jusqu’à la fin de The Locomotive, qui marque une pause bienvenue. Là, un roadie apporte à King Krule un piano, et le chanteur se transforme en crooner/rappeur/jazzman. Comme d’habitude, on ne sait pas trop quel qualificatif lui attribuer. Tout ce qu’on peut dire, c’est que l’enchaînement Logos/Sublunary est magnifique. Et que la décharge qui suit sur Rock Bottom l’est tout autant, ravivant de doux souvenirs de jeunesse.
Ensuite, Archy Marshall déroule. Tout en urgence, le chanteur balance les titres les plus puissants de The Ooz, ne s’interrompant que pour marmonner le nom de certains morceaux. Les musiciens sont, on le répète, excellentissimes, chaque chanson est parfaitement revisitée et les minutes fuient sans que l’on s’en rende compte. Vient finalement l’heure de l’au revoir sur Easy Easy, qui résonne comme un véritable hymne dans le public, puis du rappel sur Out Getting Ribs. Et là, très sincèrement, même avec la meilleure volonté du monde, il est difficile de trouver les mots. D’abord, la partie de guitare de ce morceau est sûrement l’une des plus belles de la musique des années 2010. Ensuite, King Krule chante ce soir comme si sa vie en dépendait, et ne laisse aucun répit aux frissons qui parcourent l’échine du public. Enfin, ce même King Krule explose sa Mustang sur le sol au moment de la dernière note. Puis il s’éclipse sans dire un mot.
Cet instant de rage pure laisse le public parisien complètement hébété. Chacun ressort de là un peu sous le choc, sans trop comprendre ce qu’il s’est passé, ce à quoi il a assisté. Et la réponse, finalement, est assez simple : il s’agissait là de l’un des plus beaux concerts de l’année 2017.
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