Il y a deux ans, Frente s’écrivait toujours suivi d’un point d’exclamation, coquetterie calligraphique pas forcément innocente : Frente! avait à l’époque l’étoffe de quelques grammes de plumes heurtées aux vents hostiles d’un monde de plomb. Son appendice/bouclier lui permettait alors de limiter la casse, de garder un vague ancrage sur la terre ferme, d’affirmer […]
Il y a deux ans, Frente s’écrivait toujours suivi d’un point d’exclamation, coquetterie calligraphique pas forcément innocente : Frente! avait à l’époque l’étoffe de quelques grammes de plumes heurtées aux vents hostiles d’un monde de plomb. Son appendice/bouclier lui permettait alors de limiter la casse, de garder un vague ancrage sur la terre ferme, d’affirmer maladroitement son droit à exister. Malgré cette précaution, il ne reste plus grand-chose de Marvin the album après la tempête : à peine le souvenir fluet d’un groupe fluet construit autour d’une chanteuse fluette dont les capacités vocales auraient fait passer Lio pour un crieur de pelote basque. Tout ça était bien gentil, bien mignon et inoffensif, mais sans leur délicieuse reprise à l’hélium du Bizarre love triangle de New Order, pas sûr qu’on s’en souviendrait encore. Le Frente tout neuf qui débarque aujourd’hui a nettement plus d’allure. Sous la haute protection de Booga Bear alias Cameron McVey, le pygmalion de Neneh Cherry, découvreur de Portishead ou Massive , Angie Hart et ses garçons n’ont plus peur de rien et détalent enfin de leur sitcom bleu layette pour affronter la vraie vie du dehors. La mutation est remarquable, même si Frente n’a rien perdu en route de sa ligne poids plume, ni Angie de sa gorge de femme-enfant dévoyée. La différence est marquée cette fois par des chansons qui en sont vraiment : des micro-bombes mélodiques qui outrepassent leur condition d’avortons et quittent le préau des morveuses pour entrer dans la cour des grandes. Sit on my hands introduit ainsi un peu de poussière, de mystère et de nerf dans la douce mécanique ; Horrible et Goodbye goodguy aux titres explicites se chargent d’appuyer tranquillement sur le champignon, en route pour l’échappée belle. Frente joue les effrontés tout en conservant son innocence, Angie découvre les jeux d’adultes, telle une lolita pop émerveillée par sa propre audace : ils abandonnent l’uniforme de scout guitare, feu et tête de bois pour revêtir un costume de ville, larguant au passage leur âge tendre, leur propreté militaire et leur existence d’élèves moyens. En joignant l’acoustique à l’élastique, le panache au bricolage, en ne changeant finalement que des détails, Frente dame le pion à la concurrence directe, renvoie les Cardigans au vestiaire et Sleeper se coucher. Et dégaine avec Jungle un tube mondial assuré.
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