Epices and love : Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band est un album bariolé où l’alchimie entre Lennon et McCartney atteint des sommets de pyschédélice.
Depuis au moins deux albums, le songwriting du groupe a beau être plus complexe, les tournées des Beatles se déroulent toujours dans les mêmes conditions que lors des premières heures de la Beatlemania : niveau sonore des instruments trop faible, cris des jeunes filles stridents – le groupe, alors qu’il a déjà composé une brochette de merveilles pop, n’en continue pas moins d’enchaîner des standards de rock and roll, et le contraste entre la scène et le studio se fait de plus en plus grand. Résultat, les Beatles, lassés par des concerts devenus selon les propres mots de Lennon “des foutus rites tribaux », finissent démotivés et sur les rotules – Lennon s’en va jouer dans le film How I Won the War, Harrison va jusqu’à déclarer qu’il n’est plus un Beatles.
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Il faudra donc compter sur l’imagination de McCartney pour réunir, dès la grande année musicale 1967, les quatre membres en studio. Ça tombe bien, car Paulo a de la suite dans les idées et décide d’envoyer, à la place des Beatles, un faux groupe, celui du Sergent Poivre, en tournée virtuelle via un album-concept. Il portera logiquement le nom de Sergent Pepper’s Lonely Hearts Club Band et jouera une musique pareille aux couleurs mises en avant sur la mythique pochette du disque : bariolée et pétaradante. Installé à Abbey Road, le groupe troque sa casquette de formation live pour celle, inédite à l’époque, de “structure” de studio. Pendant de longues semaines, les Beatles vont s’essayer à de nombreuses expérimentations : collage de bouts de chansons, passages de titres à l’envers, accélérations de séquences – tout ce qui relève du laboratoire d’idées est bon à prendre. Les drogues sont à nouveau au coeur des compositions (une polémique éclatera notamment autour des initiales de Lucy in the Sky with Diamonds) et le groupe, désireux de continuer à brouiller les pistes sonores, oscille entre musique de foire (sur Being for the Benefit of Mr. Kite) et fugue baroque (She’s Leaving Home), pop burlesque (When I’m Sixty-Four) et pop plus universelle (With a Little Help from My Friends, qui sera notamment revisité par Joe Cocker lors du festival de Woodstock).
Malgré une suprématie évidente de Paul McCartney sur l’ensemble de l’album, c’est sur Sergent Pepper’s Lonely Hearts Club Band que l’alchimie Lennon/Macca atteint ses sommets, plus particulièrement grâce au prodigieux A Day in the Life, chef-d’oeuvre à deux têtes qu’ils se partagent en conclusion de l’album. Mais sous cette apparente harmonie, la faille est déjà latente : le groupe, qui venait de signer un contrat pour sept nouveaux albums avec EMI, avait d’ailleurs initialement prévu d’intituler celui-ci One down, Six to Go (“Un de fait, plus que six à tirer”). Trois suffiront ensuite à rendre le divorce inévitable.
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