Sur scène, elle boit comme
un trou, hurle dans son micro,
lance des chaises sur le public,
montre ses seins. Lui danse
comme un autiste. Sexy Sushi,
duo electro français, c’est cul et
cru, comme son nom l’indique. Rencontre et écoute intégrale.
Si vous n’avez pas encore vu Sexy Sushi sur scène en 2010, vous avez probablement raté votre année. Ils sont nantais. Un gars, une fille, Mitch Silver et Rebeka Warrior. Lui ressemble à Jean-Christophe Thouvenel, arrière droit des Girondins de Bordeaux dans les années 1980 (nuque longue dégueulasse et lunettes de la Sécu option verres fumés). Elle braille des slogans dada-débiles dans le micro avec une chemise Christine Boutin, ou parfois les seins à l’air (très beaux, d’ailleurs). Le tout sur une rythmique electro martiale devant un public miperdu, mi-hypnotisé.
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Elle jette tout ce qu’elle trouve sur les gens, boit comme un trou, crache en l’air, saute dans la foule. Il danse dans son coin comme un autiste, en mode Véronique et Davina featuring Rain Man. C’est Sexy Sushi, sorte de croisement pas clair entre les Béruriers Noirs et Laurent Garnier, peut-être ce que la France fait de mieux aujourd’hui en concert. Attention, ça peut être un peu dangereux. Ceux qui les ont aperçus cet été en festival ont forcément fait attention à ne pas recevoir un pied de micro dans la figure.
Rebeka Warrior est sans conteste la star de ce duo bagarreur et attachant qui vient faire les poches d’une scène française un peu timorée, mal à l’aise avec son corps. On rencontre le duo à Paris. Ils sont discrètement assis au fond d’un café, avec perruques et lunettes noires comme dans ces émissions télé de deuxième partie de soirée où l’on transforme la voix des invités. Ils jurent pour commencer qu’ils ont déjà couché ensemble et que ça a donné un enfant très laid, ou deux, ils ne savent plus trop.
Rebeka et Mitch vivent désormais dans la capitale. Elle est arrivée il y a trois ans, lui vient de poser ses valises. Est-ce que ça va changer quelque chose à l’évolution du groupe ? Est-ce qu’il ne va pas y perdre un peu de son âme et de sa bonne rage d’outrepériph ? “Non, on est venus pour des histoires de cul. Aucun rapport avec la musique.” C’est Rebeka Warrior qui parle, sa bouche est assez sensuelle, elle porte des bretelles sur un T-shirt blanc taille enfant. Mitch ricane bêtement à côté d’elle, il est beaucoup moins sensuel. On l’a déjà vu porter sur scène des hauts de jogging d’obscures sélections minimes ou cadets du Pays de la Loire. Il est aujourd’hui plutôt bien habillé, c’est assez rare pour être signalé.
Ils retracent ensemble l’histoire du duo : “Un copain à nous organisait une soirée sur un bateau. Il avait besoin d’un groupe, on a trouvé ce nom à la con et on l’a gardé. On se prenait pour des crevettes ce jour-là, je ne sais plus pourquoi. On n’avait même pas pris de drogues. La durée de vie du projet au départ, c’était une soirée. Puis on s’est mis à jouer dans les PMU les plus pourris de Nantes parce que ça nous amusait beaucoup, cette blague de crevettes. Ça fait huit ans que ça dure. Sexy Sushi, c’est une succession d’accidents. Pour notre premier concert, on était allé acheter des perruques et des accessoires dans un magasin de farces et attrapes. Nous sommes encore sur cette esthétique, sur cette énergie”, explique Mitch Silver, la voix lente et l’oeil un peu torve.
Au départ, le projet est né dans son cerveau malade : “Je voulais faire comme Miss Kittin & The Hacker, une sorte de duo electro. Je cherchais n’importe quelle chanteuse”, dit-il avec un certain sens de la goujaterie qui amuse beaucoup son acolyte occupée à remettre sa perruque. Mitch Silver tombe alors sur Rebeka Warrior, double maléfique de Julia Lanoë, l’un des deux membres du duo folk nantais Mansfield.TYA, nettement plus sombre, sobre et appliqué que Sexy Sushi. Elle a envie de chanter et de bouger son corps comprimé par de longues études aux beauxarts de Nantes.
Pour elle, Sexy Sushi est une aubaine : “J’étais fascinée par toutes sortes de performances un peu extrêmes, l’actionnisme viennois en tête.” Mitch a trouvé sa chanteuse, Rebeka son plan cascade. Pourtant, ils ne travaillent que très peu ensemble. Mitch écrit de son côté. “Je passe pas mal de temps chez moi, je suis fasciné par la musique bouclée.” – Alain Souchon ? Julien Clerc ? – Non plutôt des trucs comme Laurent Garnier, la musique issue des raves. C’est mon truc, la musique qui tourne sur elle-même. Je n’ai pas de tabou dans le domaine. Je peux aussi écouter de la makina, des trucs assez extrêmes, blindés de BPM. Une fois j’ai été à Valence pour en écouter dans les clubs de la ville. Je suis entré en boîte le jeudi soir pour en ressortir le lundi matin. J’aime la sensation physique que peut produire ce genre de musique”, explique Mitch, les yeux pleins d’étincelles.
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