Gothique et lettré, le nouvel album des Franco-Américains visite une fois encore le Sud profond et commence à tourner en rond. Qui aurait pu prévoir, il y a quatre ans, quand parut en catimini le premier véritable album de 16 Horsepower (il fallut débusquer Sackcloth n’ashes dans les bacs import), l’importance que prendrait ce groupe […]
Gothique et lettré, le nouvel album des Franco-Américains visite une fois encore le Sud profond et commence à tourner en rond.
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Qui aurait pu prévoir, il y a quatre ans, quand parut en catimini le premier véritable album de 16 Horsepower (il fallut débusquer Sackcloth n’ashes dans les bacs import), l’importance que prendrait ce groupe dans le paysage rock d’ici ? A l’époque, cette country-punk bilieuse et référencée marquée d’une haine déplacée faisait carrément tache, comme une verrue sur la face d’une electronica déjà triomphante, bien peu en phase avec les paraboles bibliques de David Eugene Edwards, prédicateur exalté et pur objet de fantasme pour quelques lettrés nostalgiques, amateurs de Faulkner, d’Erskine Caldwell et de Jeffrey Lee Pierce…
C’était un peu vite oublier qu’en France les gros vendeurs de disques étiquetés rock ont pour nom Noir Désir et Louise Attaque et se réclament ouvertement, pour le meilleur et pour le pire, du Gun Club et des Violent Femmes. C’était oublier qu’ici la vision de l’Amérique prévalant est celle d’un Sud irascible et profond, qui coïncide très exactement avec celle véhiculée par 16 Horsepower : un monde moite, peuplé de péquenots consanguins, racistes et bigots, et dont le pauvre quotidien relève de l’épopée mythique.
Culminant avec la sortie de Low estate, album paroxystique et très inspiré, l’art de 16 Horsepower s’est généreusement dispensé sur scène, où David Eugene Edwards brûle les planches, imposant l’hallucinant spectacle d’un ménestrel prognathe et hanté, déployant tour à tour un banjo déglingué ou un bandonéon plus grand que lui. Fatalement, cette mise en scène aux limites du caricatural a fini par figer la musique du groupe, condamné à évoluer dans les limites obtuses qu’il s’est lui-même fixées.
De fait, et comme attendu, Secret South n’apporte rien de neuf, tant dans l’écriture que dans l’exécution. A l’échelle de 16 Horsepower, Secret South (rien que ce titre…) est bourré jusqu’à la gueule des clichés qui ont fait le succès relatif du groupe : la guitare couine pareil et la voix de David Eugene Edwards fait toujours penser aux miaulements de quelque chat cloué vivant sur une porte de grange. Tout juste notera-t-on l’apport pas franchement déterminant d’une section de cordes, une reprise rare de Dylan (Nobody ‘cept you), ainsi qu’une drôle de propension au gothisme, précipitant, par instants (Cinder alley), l’album dans les ténèbres d’une new-wave décidément très tendance.
On l’aura compris, Secret South s’adresse en priorité aux fans hardcore de 16 Horsepower, lesquels se délecteront de la chose comme les enfants ne se lassent jamais d’écouter encore et encore les mêmes histoires. Après tout, réciter les litanies semble bien dans le caractère mystique de David Eugene Edwards. On se demande juste combien il reste de fidèles dans l’assemblée.
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