Pensionnaires de l’estimable label Record Makers, Sébastien Tellier et Damien ont chacun publié récemment un album. Découvrez Sessions, enregistrement solo de Sébastien Tellier en visionnant deux de ses clips, et L’art du disque, premier album de Damien, en écoutant The Frogs et Mitzuki.
Alors, qu’est-ce qui nous amène à réunir ces deux disques de Damien et de Sébastien Tellier ? Ils sont camarades de label chez Record Makers, cette précieuse friche initiée par Air ? Ils sont barbus et nonchalants sur les bords ? Français ? Chanteurs ? Sagittaires ? Il pourrait y avoir de tout ça. Mais ce qui nous amène pour de vrai à croiser les routes zigzagantes de ces deux types, c’est premièrement ce respect commun qu’ils ont pour la noblesse de l’instant, pour cette main de femme qui caresserait du bois brut. Et, deuxièmement, parce qu’ils ont ce même petit vélo dans la tête, ce qui leur a permis de sortir deux disques en roue libre qui fuient loin du troupeau, souvent par l’avant.
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Commençons par Tellier. Alors, Sébastien, pourquoi sortir Sessions, ce disque de dix morceaux composé pour l’essentiel de titres de votre répertoire, enregistrés lors d’une seule et même session acoustique ? « J’ai vu un jour un épisode de Monk, une série assez bas de gamme qui passe sur TF1 l’après-midi. Dedans, il y avait Willie Nelson, qui faisait des sessions pour une radio. Tout ça m a fait tripper à mort, et donc j’ai voulu tout de suite faire comme lui, devenir un mec aux cheveux très longs qui fait de la musique ultrasimple dans un studio. »
De cette tirade, on retiendra surtout un truc important sur la fin, « de la musique ultrasimple dans un studio« . C’est bête, mais c’est ce qu’a fait Tellier ? et c’est ce qui nous émeut tant. Il y a dans Sessions cette limpidité que l’on ne retrouve que dans les grands disques sans chichis et sans wouah-wouah. Ceux dont on a l’impression à chaque écoute qu’ils sont enregistrés devant nous. Pour le croire tout ça, il faut voir La Ritournelle se balader belle à poil, goûter League Chicanos sans tremper sa langue dans la harissa ou encore se trimballer tout seul en scooter avec La Dolce Vita (empruntée à Christophe, ce génie), à la manière du bon Nanni Moretti (autre barbu céleste) au tout début de Journal intime. Sessions est un disque dont on conclut l’écoute dégagé de tout, en sandalettes même si c’est moche, avec une certaine idée de ce que peut être le bonheur.
Et c’est pareil pour le disque de Damien, jeune type de 24 ans originaire de Maisons-Alfort, qui affirme sur Amoureux, un morceau de L’Art du disque, son tout premier album, qu’il interprète un « duo virtuel » avec Serge Gainsbourg. « Par moments, j’ai l’impression que Gainsbourg veut s’exprimer à travers mon corps, qu’il dit des trucs grâce à ma bouche. » Le pire, c’est qu’il n’a qu’à moitié tort Damien. Il y a des restes du beau Serge dans les intonations nasales du jeune homme, comme sur Mandarine, comptine elliptique qui nous a offert à ce jour la succession d’images la plus intrigante de l’année : « Oh jolie Mandarine/Egarée dans la mezzanine/Ma lueur fanée s’évapore/Lentement mais elle vit encore. » Bizarre, non ? Mais il y a dans tout cela un tel souffle : notre nuque n’avait pas senti ça depuis Stereopathetic Soul Manure de Beck, ce manifeste déglingué où l’on croisait des stormtroopers (ces soldats blancs en fer sortis de La Guerre des étoiles), et autres Mexicains sous acide.
Chez Damien, c’est le fantôme de Johnny Hallyday qui joue de la guitare slide pour Champ ultime. Une voisine qui chante sur The Frogs. Ou Damien lui-même qui se déguise en Japonaise, pour chanter sur Mitzuki. Le tout sur fond de Bontempi, cordes ou piano, dans une ambiance de kermesse, où le rire et la mélancolie se mêleraient soudain, devant une quinzaine de boîtes de conserve abattues à l’aide d’une grosse balle en mousse.
Pour vous faire découvrir les uvres de ces deux loustics barbus, lesinrocks.com vous propose de commencer par Sébastien Tellier, en regardant le clip de La Dolce Vita, extrait de Sessions, et de Broadway, extrait de Politics, et de poursuivre en écoutant deux titres de Damien, The Frogs et Mitzuki, extrait de l’album L’Art du Disque.
Damien sera en concert lors de la soirée Loaded à Paris (Point Ephémère) le 5 mai. Sébastien Tellier, lui, sera à Dijon le 19 mai et le 6 juin au Café de la Danse (soirée Back To Rythm)
– www.myspace.com/damienusurpateur
– www.sebastientellier.com
– www.recordmakers.com
Avec l’aimable autorisation de Record Makers
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