Entre sad folk dépouillé et rock écorché, un grand disque sur le délitement amoureux. Critique.
Depuis ses débuts il y a plus de dix ans, deux pulsions s’affrontent dans la déjà riche discographie de Scout Niblett, Anglaise qui vit depuis plusieurs années dans la bohème Portland. D’un côté, des envies de folk et d’americana ; de l’autre, des flirts avec l’arythmie, l’inconfort, le chaos – une rage grunge apprise, entre autres, chez Nirvana. L’Anglaise n’est toutefois jamais meilleure que lorsqu’elle parvient à faire cohabiter les deux.
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Elle donne alors naissance à des chansons blues et criées, à la beauté sauvage et bouleversante. Meilleur exemple à ce jour : son minitube Kiss, qu’elle chante en duo avec Will Oldham sur This Fool Can Die Now (2008). Un disque immense talonné de peu aujourd’hui par It’s up to Emma, son sixième album. Scout l’a construit autour d’un thème ancestral : le délitement d’une histoire d’amour. Comment survit-on quand votre partenaire vous a quitté, menti, trompé ? En achetant un flingue et en refroidissant les intéressés, commence-t-elle par répondre dans Gun, titre à la violence rêche et explosive.
Les sentiments se nuancent ensuite, le tempo se calme. Les coups de colère alternent avec les larmes, la tristesse (magnifique My Man), les regrets ou le désir, toujours présent malgré les trahisons. Au-delà de sa crudité et de sa dimension possiblement autofictionnelle (Emma Louise est son vrai prénom), ce disque traduit la prise d’indépendance de la chanteuse. Après de nombreuses collaborations avec Steve Albini, elle a assuré la production et l’enregistrement du disque. Une réussite totale, que l’on quitte chamboulé, en fredonnant la superbe What Can I Do ?, rencontre lacrymale et bouleversante entre le Creep de Radiohead et la Janis Joplin des débuts.
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