Souvent éclipsé dans les esprits par la cohérence de London Calling, chichement représenté dans les compilations par les évidents 0The Magnificent Seven ou Somebody Got Murdered, Sandinista sort du cadre dans lequel le Clash a été enfermé par les faibles en imagination. On les excusera : à l’époque, les Londoniens eux-mêmes n’avaient sans doute pas […]
Souvent éclipsé dans les esprits par la cohérence de London Calling, chichement représenté dans les compilations par les évidents 0The Magnificent Seven ou Somebody Got Murdered, Sandinista sort du cadre dans lequel le Clash a été enfermé par les faibles en imagination. On les excusera : à l’époque, les Londoniens eux-mêmes n’avaient sans doute pas conscience de bousculer à ce point les conventions. Pourtant, la pochette, avec sa photographie des quatre anciens punks sapés chacun dans son style, annonce les couleurs musicales, métissées et surprenantes.
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L’Amérique, qui a été un repoussoir et un objet de fascination, souffle ici au Clash une reprise du bluesman Mose Allison (Look Here), le pousse à tâter le pouls du groove new-yorkais (Lightning Strikes) ou à entonner du gospel, de la soul. Enchaînant avec foi les jeux de rôles et rendant crédibles leurs différentes incarnations, ces quatre grands gamins se déguisent en guérilleros (Washington Bullets) ou en crooners (Broadway), organisent un carnaval (Let’s Go Crazy) ou l’insurrection. Prétendre, comme certains tristes historiens ou petits épargnants du rock, que Sandinista aurait dû être réduit à un seul disque ? et purgé de tous ces essais fantasques ? est bien une idiotie. Cela reviendrait à mettre au pas cette écriture décomplexée et sensible (Rebel Waltz, The Street Parade ou Version City) qui s’exprime ici sereinement, à couper les ailes d’un album qui ressemble à un énorme fantasme, incessante et hypnotique succession de mirages.
Derrière la mélancolie finale de Shepherds’ Delight, dub aussi doux que lugubre, on pourrait entendre l’oraison funèbre de la plus incroyable des aventures par ses acteurs eux-mêmes. Comme si le Clash se savait au bout de son rêve ? voir l’introspectif If Music Could Talk. Sandinista marque aussi la fin de l’innocence. Le groupe clôt l’album en regardant avec nostalgie son reflet : celui de quatre rockers et humbles laborantins qui se sont jetés à âmes et corps perdus dans leur quête. Jouissif trop-plein d’idées et de sensations voué à être constamment redécouvert ? les sommets avérés font ombrage à des perles plus obscures ?, Sandinista représente une expérience dont on peut ne jamais se remettre.
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