Il n’y a pas qu’en France que la real TV (ou télé réalité), à travers le désormais fameux Loft Story, donne à l’élite intellectuelle matière à réflexion.
En Grande-Bretagne cette semaine, c’est Salman Rushdie qui monte au filet dans un édito paru dans le Guardian du 9 juin. Pourtant l’écrivain explique qu’il n’a eu de cesse de se tenir à l’écart de Big Brother et consorts. Jusqu’à maintenant. Car l’énorme succès qui accompagne ce genre d’émission pousse au décryptage et à l’analyse puisqu’il nous informe sur ce que nous sommes vraiment.
Riche et célèbre sont de nos jours, selon l’écrivain, les deux concepts les plus importants de la société occidentale. Et pour être riche et célèbre, il est bon d’être désaxé, exhibitionniste,… mauvais.
Que fait-on des questions d’éthique, de morale ? s’interroge Rushdie. On les supprime, tout simplement. Pour lui, si les candidats deviennent célèbres, ce n’est pas parce qu’ils font ce qu’ils font (dormir, manger, se confesser, s’insulter, s’embrasser), mais parce que tout le monde peut voir ce qu’ils font. Ce nouveau genre de télévision génère un univers au sens moral inversé, où le pire est toujours mieux.
Mais Rushdie se demande alors à quoi il faut s’attendre dans une société où, pour nous toucher, un meurtre est à peine suffisant. Seuls les massacres font la Une. Aujourd’hui pour attirer notre attention, il faut carrément faire exploser un immeuble entier ou décimer une famille royale à la mitraillette. Combien de temps avant la première télévision de la mort (death TV) ? Et combien de temps avant la seconde ? s’inquiète Rushdie.
Il conclut son édito en se référant à Orwell. Dans 1984, Winston Smith subit un lavage de cerveau. Dès lors, il aime Big Brother. Comme nous maintenant. Aujourd’hui nous sommes les Winstons.
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