Alors c’est ça, le blues d’aujourd’hui Une paire de slackers en forme de haricot, manifestement peu enclins à peaufiner leur plan de carrière. En parfaite osmose sur scène et sur disque, Dan Auerbach (guitare et chant) et Patrick Carney (batterie) composent The Black Keys, deux blancs-becs saturés de musique noire, originaires d’Akron, Ohio, ex-capitale mondiale […]
Alors c’est ça, le blues d’aujourd’hui Une paire de slackers en forme de haricot, manifestement peu enclins à peaufiner leur plan de carrière. En parfaite osmose sur scène et sur disque, Dan Auerbach (guitare et chant) et Patrick Carney (batterie) composent The Black Keys, deux blancs-becs saturés de musique noire, originaires d’Akron, Ohio, ex-capitale mondiale du pneumatique aujourd’hui refondue par la crise et les délocalisations.
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On est loin de l’Akron des Electric Eels, Rocket From The Tombs, Pere Ubu ou Devo, loin de cette musique mutante et intellectualisée qui, au plus fort de la révolution punk, pointait sur la carte une ville puant le mal de vivre des banlieues industrielles. Avec les Black Keys, c’est carrément l’inverse qui se passe, tellement ici c’est la chair, le sang et les tripes qui commandent à la musique. L’instinct aussi.
On a beau, à leur sujet, se référer aux dinosaures des années 70, évoquer Blue Cheer ou Led Zeppelin, rien n’y fait. Rien n’explique la part animale et spontanée d’un disque comme leur précédent Thickfreakness. Rien n’indique, non plus, le raccourci spatio-temporel par lequel les Black Keys sont arrivés à plaquer tout naturellement des accords vermoulus sur des rythmes antédiluviens, comme pouvaient le faire, il y a cinquante ans, John Lee Hooker ou Hound Dog Taylor.
La formule énoncée sur The Big Come up (2002), vérifiée par Thickfreakness (2003), est encore valable avec Rubber Factory, breveté album de la maturité. Car Rubber Factory, sans vraiment se démarquer de ses prédécesseurs, s’en distingue par son intensité accrue, sa force de caractère, sa finesse de composition et son énorme maîtrise technique. Truffé de référence au garage-punk sixties (et en particulier aux Sonics, véritable obsession) et de clins d’œil à répétition à Jimi Hendrix, Rubber Factory impose à des riffs séminaux le dénuement du blues originel, la puissance des kilowatts, ainsi qu’une énergie, une frénésie et une désinvolture très post adolescentes, entre vénération des icônes et envie de pisser sur leur tombe. Quant à la politesse, Dieu sait ce qu’elle fait derrière l’église
Duo batterie-guitare à l’appui, on compare souvent les Black Keys au White Stripes : on a tort. Car autant les White Stripes n’ont jamais choqué personne, autant il y a quelque chose de subversif, voire de honteux ? donc de terriblement jouissif ? à écouter les Blacks Keys, un peu comme baver sur un calendrier de routier ou écouter un vieil album d’AC/DC en faisant semblant de jouer de la guitare. Le genre de pulsion dont on ne se vante pas, mais qu’on assume finalement assez bien, tant le plaisir est immense de satisfaire aux bas instincts. Et comme il n’y a jamais eu de mal à se faire du bien’
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