Outranciers, bruyants, comiques et excitants : les TEENAGERS, garçons hirsutes basés entre Paris et Londres, font sensation avec leurs noces sauvageonnes de rock et d’electro.
Originaires des Hauts-de-Seine, les Teenagers n’ont vraiment rien d’un groupe français. Ils chantent en anglais, vivent en Angleterre, accumulent les fans à l’étranger, tournent aux Etats-Unis, et ont même des prénoms totalement bilingues (Dorian, Michael, Quentin). Alors que la France s’extasiait sur le succès international (ça, c’était avant le scandale de la théorie du complot) de Marion Cotillard, la même nation ignorait ce trio au sommet de la hype depuis plusieurs mois dans les pays anglo-saxons. A l’exception de Phoenix, jamais un groupe français de pop chantant en anglais n’aura bénéficié d’un tel buzz à l’étranger, notamment en Angleterre – sans que personne ne s’en soucie dans son pays d’origine.
Il faut dire que ces trois gamins n’ont rien fait pour détromper ceux qui les croyaient anglais, ne cultivant pas particulièrement d’amitiés dans le milieu hexagonal de la musique, à part Justice, et poussant la confusion jusqu’à se déclarer britanniques dans leurs chansons (Homecoming). Dans un chœur parfait, ils déclarent n’avoir jamais envisagé de chanter en français : “On ne s’est jamais posé la question. On a été formatés par toutes les chansons qu’on a écoutées. Quand on a commencé à écrire Fuck Nicole, c’était directement en anglais. On ne pourrait pas dire “Nicole, va te faire bzzzzz”. Dorian, chanteur, précise que “chanter un refrain en français, ce n’est pas possible. C’est trop dur. Le type de musique qu’on fait se prête beaucoup mieux à des textes en anglais.”
Les Teenagers, bien dans le XXIe siècle, font partie de ces groupes, de Calc à Cocoon en passant par les HushPuppies, qui ont compris qu’il n’était plus indispensable aujourd’hui de se contraindre à chanter dans la langue de Johnny Hallyday pour avoir un minimum de succès, à part pour éventuellement passer sur les radios. Internet, et notamment les sites communautaires (MySpace, CQFD…), ont permis à ces artistes de s’exposer directement dans le monde entier, d’être entendus aussi bien à Lille qu’à Melbourne, en se libérant de la tyrannie de la “belle langue”.
C’est donc une page internet qui est à l’origine de la carrière jusqu’ici finement menée des Teenagers. Tout est arrivé dans la nuit de Noël 2005, quand le trio, n’ayant alors que de vagues expériences musicales en groupe (au sein de Mai, anciens lauréats CQFD), a, “en l’espace de dix minutes” et “sans véritables arrière-pensées”, créé son MySpace, finalisé une chanson et mis celle-ci en ligne. Postées sur la page, Homecoming, Starlett Johansson et Fuck Nicole ont ensuite rapidement circulé sur les blogs musicaux, créant une vraie communauté de fans acharnés.
Parallèlement, le groupe s’est fait les dents et un nom via des remixes prestigieux. Par hasard, une fois encore. “Tout proviendrait d’une faute d’anglais dans un post de MySpace. On demandait aux fans de faire un remix, et en fait un label a compris qu’on voulait, nous, remixer des morceaux. On s’est dit “pourquoi pas ?” et on a essayé. On a pensé que c’était un bon moyen de se créer une sorte de notoriété, de montrer notre univers. Ça a décollé avec Air. On était fans de la première heure, et on s’est dit que si eux nous demandaient un remix, c’est qu’il y avait un filon.”
La sensation Teenagers se propage alors, et différents labels viennent courtiser les Frenchies. Et c’est l’anglais Merok, qui a hébergé les débuts des Klaxons et qui reste soutenu par XL (White Stripes, Prodigy…), qui remporte la mise. “Avec Merok, on s’est bien entendus, ils nous traitaient d’égal à égal sans nous faire de la lèche, contrairement à d’autres”, déclarent-ils. Une signature internationale complètement dans la logique du groupe : “On préférait signer avec un label anglais, pour éviter toute la galère qu’ont les groupes français pour pouvoir jouer à l’étranger.”
Arrivés à ce stade, les Teenagers avaient déjà beaucoup fait parler d’eux, sans jamais se montrer sur scène, ayant tout bricolé via le virtuel et l’ordinateur. Certains en sont venus à se demander si le groupe existait vraiment. “La première fois qu’on a essayé de jouer en live, on ne savait même pas les chansons, on n’avait jamais fait de répète avant. On a dû réapprendre nos morceaux.” Mais le trio est volontaire, et l’approximation des débuts laisse vite place à un groupe rodé, accueilli avec un joli succès lors de la tournée américaine de janvier.
Ces dilettantes doués, qui sans fausse modestie et dans leur charmant mélange de calcul et de naïveté ne se cachent pas de l’être (“Franchement, ça ne nous a jamais pris plus de deux jours pour écrire une chanson”), revendiquent l’influence musicale de M83, Jacques Lu Cont, Madonna et les Strokes. Leur electro-pop à guitares, synthés et refrains irrésistibles tient aussi en vrac de Pulp, Gary Numan et Nada Surf. Cette musique sans complexes est aussi très anglo-saxonne dans les thèmes abordés, totalement décoincés, et l’univers des Teenagers tourne autour des préoccupations et fantasmes adolescents : épouser Scarlett Johansson, coucher avec une Américaine, picoler dans des fêtes, se faire larguer, se sortir de situations ridicules… Les paroles sont hilarantes, combinaison maligne de références culturelles et d’anecdotes vécues ou empruntées à des séries télé. Un joyeux foutoir de la jeunesse, dans la digne ligne du Bret Easton Ellis de Moins que zéro ou des Lois de l’attraction, à la fois arrogant, ironique, drôle et touchant.
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