[Deuxième anniversaire de la séparation de Daft Punk] Avec son quatrième – et ultime – album, Daft Punk ressuscitait en 2013 les fantômes des seventies tout en nous faisant sentir encore plus vivant·es.
Malgré sa mélancolie, qui se dévoile un peu plus à chaque écoute, Random Access Memories a permis de redécouvrir ce qu’était un dancefloor où les gens dansent au lieu de poser : Give Life Back to Music, annonce l’ouverture digne du Studio 54 circa 1979. Huit ans après l’incompris Human after All, étonnante antithèse de Discovery, RAM offre un condensé quasi parfait de ce dont le duo est capable, s’offrant un casting d’invités 5 étoiles.
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D’un côté, des morceaux irrésistiblement euphorisants : les fameuses collaborations avec Pharrell Williams et Nile Rodgers, Lose Yourself to Dance et Get Lucky. De l’autre, des ballades romantiques questionnant le rapport à l’autre et à l’amour : The Game of Love, Within (qui bénéficie du jeu de piano de Chilly Gonzales), Beyond. Entre les deux, des ovnis, soit Giorgio by Moroder, où le célèbre producteur revient sur son parcours avec fierté et innocence sur un fond italo-disco ultra-seventies…
Bangalter et Homem-Christo, déjà prompts aux adieux
Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo réussissent toujours à concilier les Dieux du passé avec l’air du temps, soulignant que c’est de ceux qu’ils écoutaient qu’ils ont tout appris, leurs Teachers jadis égrenés, de DJ Hell à George Clinton. On entend encore leur influence ici, bien que Paul Williams, chassant les fantômes du paradis avec un Touch rehaussé de chœurs d’enfants, rappelle le besoin d’organique : “I need something more.”
Les Daft ont d’ailleurs réduit au strict minimum l’utilisation de machines sur cet album enregistré entre Paris, Hollywood et New York, où la chaleur humaine ne peut être dissoute par les vocoders – l’imparable Instant Crush avec Julian Casablancas. Seul instrumental, Motherboard est une invitation au voyage new age alors que la pop mutine de Fragments of Time, invitant l’icône house Todd Edwards, montre comment le soft rock a pu accoucher de l’electro pop.
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Par ses textes, il en dit long sur les personnalités complexes de Bangalter et Homem-Christo, déjà prompts aux adieux : “Living the gold and the silver dream/Making me feel like I’m seventeen/And it’s crystal clear/That I don’t ever want it to end […]/But since I can’t stay/I’ll just keep playing back/These fragments of time/Everywhere I go/These moments will shine.” D’autant que Daft Punk s’est soustrait à une tournée qui aurait pu être l’une des plus rentables de l’histoire de la pop music. Sans doute parce qu’ils savaient que cette recherche instrumentale ayant nécessité de longues années de travail, cet équilibre si fragile entre rythmique et mélodique, mainstream et expérimental n’aurait pu être recréé sur scène.
Equilibre qui fait de Random Access Memories l’album cathartique de Daft Punk. Celui sur lequel on danse et on pleure, où les colères appartiennent au passé, qu’on ne cesse cependant de convoiter avec nostalgie, où les oracles, tel celui scandé par Panda Bear sur l’hypnotique Doin’ It Right, deviennent plus qu’un fantasme : un tour de magie qu’on ne pourrait plus jamais reproduire à l’identique. Qui pourrait faire tout exploser au moindre Contact, tel celui élaboré avec DJ Falcon. Il clôt avec fracas ces souvenirs aléatoires qui font appel à la mémoire vive des ordinateurs mais aussi à celle d’hommes robots au cœur tendre.
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