Si vous aimez le rock débraillé, de Sonic Youth à Mac DeMarco, vous craquerez sans doute pour ce garçon aux cheveux verts. Et pour le morceau qu’il dévoile ici en avant-première.
Le grain n’est pas net, l’image est grisonnante, filmée en contre-jour. Sur le mur, des affiches de Nirvana, Mudhoney, Sonic Youth. Thoineau aka Th Da Freak se fend d’un sourire satisfait et d’un bonnet qui laisse échapper quelques mèches de cheveux verts tout en traficotant les accords de guitare qui lancent le morceau de Thick Head.
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L’introduction de son nouveau clip, Thick Head, caractérise bien l’univers de ce jeune bordelais biberonné à la culture grunge des années 90. Pourtant Th Da Freak (« The Freak prononcé à la gansta »), se démarque de ses influences par un son bien à lui, en proposant une approche lo-fi qui louche de Mac deMarco à Sonic Youth. Il suffit d’enchainer ses clips – totalement DIY – pour se plonger dans cette bulle de coolitude et de nonchalance, dans lesquels il filme les recoins gris ou les aires d’autobus de son quartier avec sa bande de potes, les slackers de Flippin’ Freaks.
Après trois productions en 2017, un album (The Freak) et deux eps, il s’apprête à sortir The Hood le 23 février sur Howling Banana Records. Dedans, il y aura ce titre à découvrir en avant-première ici avec le clip de Thick Head. Et d’autres choses dont il nous parle dans l’entretien qui suit.
Comment as-tu travaillé sur ce nouvel album ?
Je fais tout tout seul, depuis toujours. Avec du matos que j’ai chez moi, du matos pas ouf mais bon. Pour cet album, je suis allé chez mes parents pendant trois jours et j’ai tout fait d’un coup, à Andernos, sur le bassin d’Arcachon. J’ai écris aussi les paroles, qui parlent principalement du quartier résidentiel Caudéran, où j’habite à Bordeaux. C’est pas génial parce qu’il y a que des vieux. C’est bizarre mais c’est cool. C’est là qu’a été tourné le clip d’I don’t Understand. Il y a des endroits vides, des chemins de fers, des terrains de foot où les gamins vont le samedi. Et des magasins nuls. Une espèce de banlieue nulle, quoi. Je m’y sens pas trop à ma place, et ça crée une ambiance chelou. Parfois c’est rigolo, parfois badant. L’album parle de ça et de ma vie… le fait de faire des soirées qui parfois ne servent à rien, le fait d’aller boire une bière avec des copains. Mi-heureux, mi-badant. Mais j’ai déménagé maintenant, je suis dans le centre ville.
Tu dis appartenir à une bande de bordelais « qui pensent vivre à Seattle en 92 ». Ça consiste en quoi ?
Oui, avec les Flippin’ Freaks, un collectif d’artistes. On est tous musiciens, on s’est tous un peu barrés de Bordeaux il y a quelques années et puis il s’est avéré qu’on s’y est tous retrouvés par la suite. On est une quinzaine de gars, il y a presque un groupe par personne et on joue tous dans les projets des autres. Il y a aussi un illustrateur, des mecs qui font du graphisme ou ce genre de choses. On organise des soirées, des concerts de rock. On est dans notre délire, on kiffe trop les nineties et puis on s’en fout du reste.
Comment t’es venu cet engouement pour la scène 90’s ?
J’ai été éduqué par les groupes des 90’s qui avaient ce message de rébellion de la jeunesse. Puis j’ai eu une période de ma vie où j’écoutais de la musique tous les jours. Je suis un énorme digger de musique, j’ai téléchargé un milliard de musiques. J’ai passé trois ans de ma vie à écouter genre cinq albums différents par jour. Et je me suis fait une culture des 90’s comme ça, en restant chez moi. C’était pendant ma licence de droit. J’étais à l’institut catholique de Toulouse, j’étais pas très sociable, les gens n’étaient pas géniaux, mais j’avais besoin d’un encadrement pour réussir mes études, à la fac ça aurait été compliqué. Je suis allé jusqu’au bout de la licence… mais finalement la musique a pris le dessus.
Qu’est-ce que tu penses de la scène française actuelle ?
Il y a une scène garage trop ouf en France. A Toulouse avec Kevin Colin et les Crazy Antonins, qui ont un truc à part entière. A Nantes, Paris aussi, il y a pleins de petites scènes dans chaque ville, avec chacune leurs attitudes et ça crée un truc méga cool.
A Bordeaux, ce serait quoi du coup ?
Des slackers qui s’en branlent un peu et qui aiment faire du gros son et qui sont très émotifs, aussi.
Tu te définis comme un slacker mais tu es hyper prolifique en plus : deux albums et deux ep en deux ans.
C’est bizarre de se définir comme slacker, déjà. Mais ce mot, je ne le vois pas forcément dans le travail, je le vois plus dans l’attitude. Dans le fait d’être détaché des conséquences de ce que je peux faire. Genre je m’en fous que ça marche ou pas, mais je le fais quand même. Mais dans le travail, je suis pas un slacker, je sors plein de trucs. Après, c’est parce que les gens ont peur de sortir plein de trucs en France, ça m’énerve un peu d’ailleurs. Tout le monde a envie de rester propre, de sortir un album au bon moment, selon une certaine stratégie. Ça fait qu’il y a moins de musiques aujourd’hui. Moi je le fais parce que j’ai envie de sortir des trucs aussi. Et les gens se lassent vite de la musique aussi, même moi je me lasse de ma propre musique, donc si je fais pas de nouveaux trucs, je ne me sens pas bien.
Tu préfères ne pas trop retoucher ta musique et la sortir rapidement?
Ouais, carrément. J’enregistre mon truc, je le fais mixer, et je le sors maximum six mois après. Si ça sort pas après six mois, ça m’énerve, j’en ai marre des morceaux. The Hood, je l’ai enregistré cet été par exemple.
The Hood est assez différent du précédent, pourtant sorti il y a quelques semaines seulement.
J’essaie de faire des œuvres différentes à chaque fois, et je me mets des petites contraintes, aussi. Genre là, pour The Hood, j’avais genre trois instruments et un ampli. J’ai pas vraiment cherché à mettre des sonorités, là je suis plus dans la composition des morceaux, et dans l’écriture et tout, plutôt que des trucs complètement barrés qui vont partout. Je me suis plus donné sur le song-writting.
The Hood sortira le 16 février. En tournée à partir du 2 février, Th Da Freak sera de passage à Paris pour la release party de l’album le 6 mars à l’Olympic Café.
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