Le chanteur franco-anglo-jamaïcain Hendrix Harris déploie un projet qui mélange les genres. Il nous raconte la genèse de son troisième EP “Blue”, paru le 19 mai 2023.
Il est 17 h. Rendez-vous à la Petite Halle de la Villette. Il fait 27 degrés. Le trajet en tram était épouvantable. 17 h 20. Hendrix Harris a été retardé. D’une prestance vintage évidente, l’artiste arrive, s’excuse d’une voix rauque, boit un verre d’eau et s’assied. Il est fin prêt à raconter ses débuts dans la musique, ses tourments, ce qui l’inspire, son attache à ses diverses origines, son ressenti lorsqu’il se trouve chez lui à Londres, ses relations tumultueuses… L’enregistrement est lancé.
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Bercé par la musique depuis son plus jeune âge, Hendrix Harris est le fils d’un mélomane français, qui affectionne tout particulièrement le chanteur cubain Benny Moré, et d’une mère anglo-jamaïcaine passionnée de soul et de jazz. Alors qu’il a passé une partie de son enfance à La Havane, capitale de Cuba, le rappeur se rappelle se réveiller aux odeurs des repas que sa mère préparait et aux musiques qu’elle écoutait : Billie Holiday, Marvin Gaye, Nat King Cole, Otis Redding…
Comme beaucoup de jeunes artistes, Hendrix a eu plusieurs groupes de musique dans lesquels il était le frontman, le leader. “Je me suis toujours senti à l’aise à la place de leader, mais à l’époque je préférais vraiment me fondre dans un groupe. Puis Louberry, mon ami, mentor de production et claviériste dans un de mes groupes, m’a vraiment motivé à lancer mon projet solo”, nous raconte-t-il. Quelque temps après, en 2018, Hendrix sort son premier morceau en solo, Bankwrapped, pour lequel il est repéré par différents labels aux États-Unis. Il sait pertinemment qu’il se passe quelque chose mais veut encore retarder l’échéance. Il le fait. Hendrix Harris, l’hybride entre rappeur et chanteur, naît enfin. L’étape vertigineuse de lancer son propre projet est franchie ; il ne peut plus faire marche arrière.
Le rap comme première maison
Âme de rappeur, de jazzman et de chanteur, Hendrix se cherche, se teste, se trompe, se découvre, se complaît et se trouve. “À mes débuts, j’étais plus libre, plus éclectique mais moins certain de mon identité. J’ai essayé différentes choses dont beaucoup de rap. Maintenant, tout s’est synthétisé en moi. Je chante plus que je ne rappe. Je sais où je veux aller. Mais je ne serai jamais fermé à essayer de nouvelles choses”, confie Hendrix.
Après deux premiers EP, Falcon sorti en 2020 et Horus sorti en 2021, aux sonorités rap, hip-hop et déchaînées, Hendrix passe par une étape de sa vie douloureuse qui l’inspire et l’attire, pour son troisième EP Blue, vers des sonorités plus jazzy, soul et R&B. “C’est lorsque je me suis retrouvé dans une relation longue et intense que ma vie a changé. C’est à ce moment-là que je suis devenu adulte. Quand je rappais, j’étais plus énervé, je ne me sentais pas en adéquation avec le monde dans lequel j’étais. Je ne me sentais pas bien à Paris, donc j’ai déménagé à Londres et j’ai commencé à chanter… Tout ça a fait qu’aujourd’hui, je suis plus en paix avec moi-même et ce qui m’entoure.”
Blue, sorti le 19 mai 2023, est sensuel, langoureux, amer et poignant. Dans ce cinq-titres, représentant la couleur de ses émotions, Hendrix se confie quant à cette relation toxique dans laquelle il se trouvait. “J’ai écrit ces morceaux pendant et après la relation, après y avoir mis un terme et être parti de Paris. Il y a aussi deux morceaux qui parlent de l’après et du début d’une nouvelle romance. C’était logique pour moi que ce soit un EP plus chanté, c’est finalement la manière la plus directe pour exprimer mes cassures intérieures.”
Une renaissance à Londres
Le déménagement à Londres est une renaissance pour l’artiste. Que ce soit artistiquement ou culturellement, Hendrix se sent bien plus à l’aise dans la capitale anglaise. “La scène musicale est beaucoup plus ouverte. La société l’est aussi. Les gens s’habillent réellement comme ils veulent. Personne ne va les regarder ou les juger. C’est un endroit plus libre. Les gens communiquent largement plus à Londres qu’à Paris.”
C’est même d’ailleurs plus logique et naturel pour lui de chanter en anglais. “Je n’écoute pas de musiques en français à part les classiques et intemporel·les Barbara, Brel et Gainsbourg. Mes parents n’en écoutaient pas non plus. C’est ma langue pour parler mais ce n’est pas mon langage artistique.” Si ses trois EP témoignent parfaitement des différentes facettes musicales de Hendrix, on le sent pourtant bien plus sûr de lui et plus serein dans ce sublime Blue.
Un projet de huit titres, toujours dans ce style cloudy R&B, viendra prochainement compléter les cinq morceaux de Blue et reviendra sur cette nouvelle romance, très belle au début, mais qui l’a fait finalement replonger dans de mauvaises vibes. Puis suivra un premier album, qu’Hendrix définit plus comme une “quintessence” de ce qui il est, en revenant vers certaines racines qui lui sont chères.
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