Cette semaine, Tame Impala dévoilait le titre et la pochette de son nouvel album, « Currents », qui paraîtra vraisemblablement dans le courant de l’année. S’il est trop tôt pour déterminer la couleur de ce nouvel album, il n’est pas interdit d’émettre quelques hypothèses à l’écoute des deux extraits dévoilés…
Une tournure plus électronique
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Là, on ne se mouille pas beaucoup. Le groupe avait déjà annoncé vouloir opérer une tournure plus électronique avec ce nouvel album, et ce n’est pas tout à fait incohérent quand on regarde le parcours de Tame Impala. Kevin Parker, voix classic-rock à l’esprit de producteur électronique, se réclame depuis toujours de DJ Shadow, vénère Air et multiplie les reprises (Midnight Juggernauts) et les collaborations (Discodeine) qui dévient du tout-venant guitaristique. Et à l’écoute des deux morceaux proposés (surtout Let It Happen), le Tame Impala nouveau devrait totalement laisser de côté les six-cordes qui fuzzent et les inclinations blues-rock. Ce qui n’est pas plus mal, au final.
De plain-pied dans la pop mainstream
Les velléités pop de Kevin Parker ne sont pas tout à fait nouvelles. A l’époque de la sortie de Lonerism, il disait vouloir réaliser un album entre Todd Rundgren et Britney Spears, et proclamait avoir dans ses cartons tout un tas de tubes cheesy insortables. Ajoutons à cela la tendance du groupe à reprendre des tubes inattendus (tels que Prototype de Outkast ou Remember Me de Blueboy), il semble assez logique que Kevin Parker se soit laissé aller à ses penchants les plus sucrés. De plus, sa collaboration avec Mark Ronson se fait aujourd’hui particulièrement sentir : du découpage rythmique (claquements de doigts, silences opportuns) au vocoder qui évoque Julian Casablancas passé à la moulinette Daft Punk (soit le parangon du rocker mainstreamisé à mort), tout appelle à l’universalisme pop. On est définitivement plus du côté de Kylie Minogue que de Tamam Shud, donc.
Une volonté de se lâcher totalement…
Si il y a quelque chose à noter depuis la parution de Lonerism et ce qui en a découlé, du succès massif rencontré en festival aux collaborations diverses (notamment avec Kendrick Lamar) en passant par l’adoubement général de la critique et de ses pairs, c’est la propension nouvelle du père Parker à se lâcher. Hier esprit plutôt timoré et recroquevillé sur ses inhibitions, il semble aujourd’hui en pleine possession de ses moyens, notamment lorsqu’il ose reprendre le Stranger in Moscow de Michael Jackson (ce qui était tout de même assez casse-gueule), ou lors des Live Versions, EP live sorti l’année dernière qui voyait Tame Impala distordre ses chansons et les remodeler en direct (on pense notamment à Be Above It, ouverture un peu pataude de Lonerism qui se transforme ici en cavalcade épique de plus de 7 minutes à la The Field). Dérèglement des sens, décloisonnement des genres et assurance nouvelle : tout ceci pourrait bien amener à débrider la folle créativité du leader de Tame Impala.
…mais qui sombre dans l’auto-satisfaction
Le problème avec le fait de se lâcher complètement, c’est le risque de se vautrer dans l’auto-complaisance, et Tame Impala n’est pas à l’abri de sortir son Be Here Now, soit un troisième album boursouflé et rempli d’auto-satisfaction – un vrai album de kéké de la part de notre Kevin, donc. Il n’y a qu’à voir Let It Happen : les ambitions sont clairement revues à la hausse, et le fait d’avoir tourné pendant deux ans et de s’être fait répéter que l’on était un génie n’a peut-être pas aidé. Apparemment, Kevin Parker aurait passé encore plus de temps à composer et enregistrer seul ce nouvel album qu’il a pu le faire par le passé : le risque de se retrouver à l’arrivée avec un disque masturbatoire et imbu de lui-même n’est donc pas à exclure.
Des dérapages trop maîtrisés ?
Lorsqu’on écoute la production de Let It Happen ou ‘Cause I’m A Man, il est indéniable que Kevin Parker maitrise de plus en plus son sujet. Trop, peut-être ? Il n’y a qu’à comparer ces nouvelles chansons avec le dernier album de Pond, Man It Feels Like Space Again, publié en début d’année. Là où la musique de Kevin Parker semble vouloir conquérir le monde (avec en contrepartie le parti-pris d’arrondir les angles), celle du petit frère indiscipliné de Tame Impala lance des fusées dans tous les sens, ne sait pas où donner de la tête, et livre à l’arrivée un disque tout à fait jubilatoire, aux couches et idées démultipliées. Certes, Let It Happen dure près de huit minutes, mais sa structure à tiroirs se pare de dérapages très (trop?) maîtrisés pour être tout à fait honnêtes (coucou, j’appuie sur ma pédale de loop pour donner une illusion d’extravagance). Rétrospectivement, les bifurcations de Nothing That Has Happened So Far Has Been Anything We Could Control ou Apocaplypse Dreams apparaissaient autrement plus spontanées. Attendons néanmoins la sortie de Currents pour pouvoir juger sur pièce…
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