Voici un disque idéal pour ceux qui estimeraient que Godspeed et A Silver Mt. Zion ont un peu trop l’esprit à la rigolade. Spécialisés dans l’accompagnement live de films expérimentaux, les Américains du Boxhead Ensemble ? au sein duquel œuvrent régulièrement des membres de Califone, Dirty Three, Smog ou Souled American ? sécrètent une musique […]
Voici un disque idéal pour ceux qui estimeraient que Godspeed et A Silver Mt. Zion ont un peu trop l’esprit à la rigolade. Spécialisés dans l’accompagnement live de films expérimentaux, les Américains du Boxhead Ensemble ? au sein duquel œuvrent régulièrement des membres de Califone, Dirty Three, Smog ou Souled American ? sécrètent une musique ectoplasmique, tout en brumes et feux follets. Allergiques au bla-bla et à la fantaisie (un livret réduit à sa plus simple expression, des numéros en guise de titres), ces joyeux drilles invitent doucement mais fermement l’auditeur à se concentrer sur l’essentiel : leurs mobiles sonores, structures hypnotiques suspendues à quelques cordes lentement filées, juste lestées de notes perlées de guitare ou de contrebasse.
Quartets n’est pas vraiment un disque de musique de chambre, plutôt une musique d’antichambre, postée rêveusement au seuil du minimalisme américain, de l’ambient et du postrock le plus alangui. C’est ce refus de s’identifier, cette volonté d’embrasser plusieurs mondes sans en intégrer un seul qui distinguent cette formation de toute la ribambelle de groupes à gueule d’atmosphère qui bourgeonne ces temps-ci outre-Atlantique. C’est aussi la lumineuse justesse de ton d’une musique qui, telle une veilleuse dans l’immensité de la nuit, repousse sans cesse la noirceur menaçant de l’engloutir. Composant la plupart de ses élégies muettes en mode majeur, le Boxhead Ensemble s’acquitte en fait d’une très noble tâche : il oppose aux kilos de plomb de cette époque les kilos de plume d’une musique sans attaches, libre comme l’air.