Loin du cirque Pistols, John Lydon ose un album bizarrement personnel, fusion à froid de toutes les musiques blanches. Après le formidable couac, le mémorable non-événement que fut la reformation des Sex Pistols, John Lydon revient sur la pointe des pieds, profil bas, sans panoplie Rotten ni médiatisation outrancière. Autant dire PIL poil au moment […]
Loin du cirque Pistols, John Lydon ose un album bizarrement personnel, fusion à froid de toutes les musiques blanches.
Après le formidable couac, le mémorable non-événement que fut la reformation des Sex Pistols, John Lydon revient sur la pointe des pieds, profil bas, sans panoplie Rotten ni médiatisation outrancière. Autant dire PIL poil au moment où on ne l’attendait plus. Tout en mid-tempo sans excès, ce premier album solitaire s’est d’ailleurs bâti sur trois fois rien, à des lieues du tohu-bohu d’hier. A la manière d’un Alan Vega britannique, retenu et digne, Lydon bricole les musiques de l’heure pour monter une calandre bigrement personnelle. On y devine encore les fuselages de Public Image Ltd, on y retrouve la parenthèse Leftfield retaillée par les Chemical Brothers, mais on y perd vite ses marques et sa boussole. Trois ans de four et de moulin, ponctués par les intermèdes destroy alimentaires, auront été nécessaires pour brouiller les pistes et accoucher de cette souris, de moins en moins anodine lorsque ses mélodies diffuses s’incrustent. Ce qui de prime abord ne cache qu’un canevas de trafics sonores devient à usage répété une magistrale fusion à froid de tous les sons blancs. Trop sombre pour parler le trip-hop estival couramment, trop abrupt pour assurer un semblant de danse, trop poétique pour les breakbeats pas de l’oie, John Lydon n’en fait qu’à sa tête, supporte seul toutes les parties du jeu, de l’échantillonnage à la production, des mots aux images. Mais sans misanthropie rédhibitoire. Sa grande force depuis toujours est de savoir prendre les vents et les courants ascendants sans se laisser dicter une loi. En dix titres, dont le merveilleux Sun uniquement enregistré à l’aide de rouleaux de papier toilette et d’un vieil accordéon crevé, Psycho’s path corrobore l’idée d’une nouvelle voie, flottante et venimeuse, fragile et sécessionniste, au sein de la techno anglaise. Et les meilleurs cuisiniers du genre (Moby, Leftfield, Chemical Brothers ou Danny Saber) viennent rallonger la sauce au thermo-mixer, soit quinze plages au total, pour valider l’à-propos moderniste du parrain de l’extrême. Trop fier pour jouer un rôle sa voix nasillarde reconnaissable entre toutes lui interdit du reste le port du masque , John s’accorde là une intense récréation, sans rien nier de son passé. Ce disque est à la fois une bonne surprise et une étape logique au sein d’une carrière pas si décousue que ça. Disons que les temps et les armes ont changé, que les angles se sont arrondis, que les slogans ont laissé la place à une mélancolie contractée. De la lecture des actualités à leur compréhension, il y a un pas que Lydon franchit allégrement.
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