Performances, installations, expositions : depuis vingt ans, le PS1 Art Center mélange les genres à New York.
C’est un grand bâtiment de brique rouge, aux murs secs et géométriques, comme ceux d’un pensionnat anglais. Trois grandes lettres s’étalent sur l’une de ses façades : PS1, pour Public School 1. Une ancienne école de Long Island City, devenue centre d’art, à quelques stations de métro de Manhattan. Après trois ans de fermeture pour rénovation, PS1 vient de réouvrir ses portes au même endroit mais dans des locaux amples et lumineux, rénovés par l’architecte Frederick Fisher. Sous l’impulsion de sa directrice, Alanna Heiss, PS1 défend depuis plus de vingt ans (la première exposition, « Rooms », date de 1976) les tendances les plus anticonformistes de l’art contemporain, avec une tendresse particulière pour les performances, installations et oeuvres in situ. Et une envie toujours plus grande de mélanger les genres, la danse et la vidéo, le théâtre et la performance, le public et l’exposition : les nouvelles scènes, dont le festival Exit est un bon exemple, mais qu’Antoine Guerrero, conseiller artistique de PS1, qualifie en riant de « vieilles scènes new-yorkaises ». Pour l’artiste Antoni Muntadas, qui a projeté, lors de la réouverture du centre, des images du bâtiment filmées avant qu’il ne devienne centre d’art (des tableaux noirs, l’écriture à la craie des maîtresses, les livres scolaires et les pupitres des élèves), PS1 « est typique des espaces alternatifs new-yorkais issus des années 70, comme Artists Space ou The Kitchen. Un lieu qui maintient des pratiques d’intervention in situ nées à l’époque et un bâtiment recyclé, sur lequel on peut intervenir de façon discrète, à l’abri de l’agitation médiatique de Soho et Chelsea. » Un lieu typiquement new-yorkais, jusque dans son architecture : grandes baies vitrées donnant sur Manhattan, escaliers extérieurs et murs de grillage. Un immense espace, dont le moindre centimètre, du toit à la bouche d’incendie, est à la disposition des artistes. Textes muraux de Lawrence Weiner et peintures de John Baldessari à l’entrée, miroirs de Dan Graham au premier étage, une table et une chaise de Rachel Whiteread au troisième niveau, un mur en pleurs d’Ann Hamilton… Huit expos, plus de cinquante installations, les oeuvres actuellement montrées sont partout, parfois presque invisibles. Comme l’installation de Nari Ward qu’il faut aller chercher dans le grenier du bâtiment ou cette femme vidéo, emprisonnée sous le plancher par Pipilotti Rist, qui implore les passants de la libérer. « Cet endroit ne peut pas être assimilé à un musée ou àune galerie, parce qu’il n’y a pas une vision mais des visions de l’art et des artistes. Notre mission est de montrer au public ce qui se fait, sans prétention et avec peu de moyens : nous sommes le plus grand centre d’art du monde avec le plus petit budget du monde », explique Antoine Guerrero. Financé par la municipalité de New York et des sponsors privés, PS1 a surtout réussi à mettre en place un programme de résidences pour artistes étrangers (dont Claude Lévêque et Annette Messager ont bénéficié par le passé). Dans le cadre du festival Exit, la Maison des arts de Créteil accueille cinq artistes choisis par Antoine Guerrero autour du thème des contes de fées. « Parce que j’y crois, dit-il, et parce que je me suis rendu compte qu’aujourd’hui beaucoup d’artistes travaillaient sur le thème de la narration, par opposition à l’art conceptuel des années précédentes. Les oeuvres sont plus joyeuses, plus ludiques qu’avant. Cette expo sera comme un voyage fantastique. » Claudia Hart et Sam Samore devraient présenter une installation en commun, un mélange de fiction littéraire et d’écriture sur vitre, tandis que les artistes viennois Markus Muntean et Adi Rosenblum ont prévu de mettre en scène un tableau animé, faisant intervenir acteurs, sculpture et peinture. Clou du spectacle (vivant), la marionnette du New-Yorkais Michael Joseph. En tirant sur des ficelles, le public pourra actionner les bras et jambes d’un pantin géant : l’artiste lui-même.