Personne n’aurait pu décemment parier un kopeck sur les chances de Labradford au moment où cet album déboulait dans les bacs d’imports américains en pleine dictature grunge. Ils avaient tout contre eux : de vraies têtes de tueurs à opposer aux visages poupons, le Music for airports d’Eno dans leur biberon plutôt que les Stooges. […]
Personne n’aurait pu décemment parier un kopeck sur les chances de Labradford au moment où cet album déboulait dans les bacs d’imports américains en pleine dictature grunge. Ils avaient tout contre eux : de vraies têtes de tueurs à opposer aux visages poupons, le Music for airports d’Eno dans leur biberon plutôt que les Stooges. Aux riffs du grunge, Labradford opposait acoustique et muraille de vieux synthés. Choisi comme symbole de la guérilla anti-grunge, Labradford devait pourtant rapidement prendre le large avec la sortie du second, A Stable reference, succès invraisemblable. Pas de basse, pas de batterie, rien qu’un confort froid, à l’image de ces ustensiles d’ingénieur sur la pochette de Prasizion, aujourd’hui réédité. Si des landes industrielles ponctuent le disque, on prendra bien soin de ne garder que les petits moments de vie sur fond de glacier, là où domine la voix de Mark Nelson, sensuelle et moqueuse, petit feu de bois dans cet univers désolé. Beaucoup d’échos dans Prasizion mais aucun de vraiment cartographié : on pourrait penser au Nick Drake de Riverman, au Section 25 de Desert, voire à Sonic Youth sur Sliding glass. On dit que cela fait partie de la magie des glaces que d’entendre des échos trompeurs. Mais après une heure de cet easy-listening sibérien, toute critique ou comparaison devient inopérante, et si le terrain défriché ici a été quelque peu récupéré par la suite, Prasizion reste toujours une référence du genre.
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