Adepte des albums concepts, l’Américaine de 30 ans est un OVNI sur la scène de Los Angeles. Compositrice avant d’être interprète, narratrice autant que chanteuse, elle écrit des poèmes qu’elle expérimente ensuite en chansons, à l’image de son quatrième album « Have You In My Wilderness » qui sort à la fin du mois.
Depuis la sortie de son premier album Tragedy en 2011, on essaie tant bien que mal de comprendre ce que Julia Holter cherche à produire. Expérimentations électroniques, pop décousue et instruments traditionnels : chaque nouvel album de Julia Holter est le contre-pied du précédent, notamment grâce à leurs concepts déroutants. L’arrivée de son nouveau disque Have You In My Wilderness, prévu pour le 25 septembre, est l’occasion rêvée de revenir sur les débuts de la Californienne de 30 ans dont la créativité débordante explose sur son nouveau single, Sea Calls Me Home.
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Déjà quatre albums en cinq ans
Du théâtre antique d’Euripide, à une nouvelle de Colette, en passant par la poésie de Frank O’Hara, ce sont des thématiques précises et pointues qui accouchent à chaque fois d’un album différent. Celle qui se considère plus comme une conteuse qu’une simple chanteuse sembler préférer mettre en musique un roman que son autobiographie : l’Américaine s’invente des personnages, des univers auxquels elle s’attache à donner vie, dans un esprit presque cinématographique. En 2013 elle déclarait ainsi à The Fader :
“Je suis essentiellement dans la création des films qui sont des albums, par opposition aux albums qui ressemblent aux bandes originales de films.”
Très productive en solo (quatre albums en cinq ans), on ne compte également plus ses nombreuses collaborations : Linda Perhacs, Michael Pisaro ou encore Nite Jewel en 2013. Cette année, Julia Holter a par ailleurs glissé sa voix sur le nouvel album de Ducktails, le très baroque St. Catherine. Elle a également rejoint le « super groupe » Terepa aux côtés de Laurel Halo, Lucrecia Dalt et Rashad Becker qui a sorti un premier EP cet été.
De Los Angeles à la Grèce Antique
L’artiste a grandi à Los Angeles dans un contexte favorable à sa formation artistique. Sa mère est une historienne et académicienne renommée de l’université de Californie du Sud, son père est également musicien et aurait une fois joué de la guitare pour Pete Seeger. Dès l’âge de huit ans, Julia suit une formation classique au piano, mais au fond d’elle s’imagine déjà jouer le répertoire de Joni Mitchell. Ses goûts vont du folk à la pop. Dans un entretien avec Clash, elle cite notamment Steely Dan, The Travelling Wilburys, Bob Dylan ou encore Billie Holliday au moment d’évoquer ses passions pré-adolescentes.
Julia Holter commence à chanter au lycée mais n’appréciant pas sa voix, elle se replie rapidement sur la composition. Ses premiers travaux sont d’ailleurs dénués de toutes paroles, elle débute alors en coulisse, composant pour d’autres artistes et s’imaginant écrire des albums sans avoir l’intention de les interpréter.
C’est pour étudier l’art de la composition que l’Américaine entre à la fameuse école CalArts (California Institute of Arts), créée en 1961 par Walt Disney. Élève introvertie, elle y trouve pourtant sa place puisque l’établissement lui laisse le temps et la possibilité de travailler seule sur ses projets sans lui imposer de collaborateur ni de route à suivre. Cet apprentissage particulier, proposé dès l’origine par CalArts pour former les futures virtuoses des studios Disney, lui permet de développer une palette musicale allant autant du néo-classique aux expérimentations électroniques.
Après la composition, elle finit par s’attacher à l’écriture, et étudie la poésie en se disant que c’est ainsi qu’elle va parvenir à écrire ses premiers textes. Elle tente d’abord d’adapter des poèmes de Frank O’Hara en chansons, puis elle écrit ses propres poèmes et au fil du temps, parvient à les combiner avec ses compositions. La Californienne reprend alors le chant avec plus d’assurance et sort ainsi son tout premier EP Eating The Stars 2007, puis participe à une première compilation l’année suivante.
Toujours soucieuse de produire l’oeuvre la plus personnelle possible, la multi-instrumentaliste enregistre ses deux premiers albums solo Tragedy et Ekstasis (2012) seule, chez elle, dans sa propre chambre, avec un minimalisme déroutant. Réalisés et sortis dans un intervalle de temps très court, ils ont la Grèce Antique comme thématique commune.
« Ce sont deux sœurs adoptives expliquait-elle il y a deux ans à Clash. Je les ai écrit en même temps, mais je ne les considère pas moins comme deux projets distincts. »
Elle pose ainsi les solides fondations d’un univers art-pop qui ne va pas cesser d’évoluer au fil du temps.
Une rencontre qui change tout
En 2013 Julia Holter décide de donner à sa musique une autre stature en envoyant les démos de son troisième disque Loud City Song au producteur Cole M. Greif-Neill (comparse d’Ariel Pink dans Haunted Graffiti). Le disque est donc cette fois-ci produit en studio, où Julia Holter enregistre pour la première fois des arrangements avec d’autres musiciens. Loud City Song est un album concept imaginé autour d’une nouvelle, Gigi, qui a été écrite par Colette en 1944, puis ensuite adaptée en film et en comédie musicale. La jeune américaine fait elle le choix de transposer le récit dans le Los Angeles contemporain, au lieu du Paris de la première moitié du 20e siècle.
De nouvelles thématiques sont également à prévoir pour son quatrième album Have You In My Wilderness où Julia Holter se distingue « autant par le chant que le storytelling » explique-t-elle à Fact Mag. Mais cette fois-ci, la Californienne semble avoir vu le choses en grand, à l’image du premier extrait révélé cet été, Feel You : elle a presque entièrement délaissé son home studio pour une nouvelle collaboration avec Cole M. Greif-Neill, qui s’annonce encore plus spectaculaire, mais sans pour autant tomber dans la grandiloquence.
Julia Holter se produira au New Morning à Paris le 16 Novembre.
Album Have You In My Wilderness le 25 septembre chez Domino
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