Ultime et talentueux rejeton du grand mix à la brésilienne, Pedro Luis débarque en France avec un nouvel album et deux concerts.
« J’aime la vie », répond le Brésilien Pedro Luís quand on lui demande pourquoi et comment, à 48 ans, il réussit à en paraître 15 de moins. Et qui aime la vie aime la musique, toutes les musiques. Et tout petit déjà, Pedro Luís aimait la vie. Dans sa famille, à Rio de Janeiro, maman chante en amateur, les grandes sœurs chantent aussi et s’accompagnent à la guitare, papa n’est pas musicien, mais il inscrit ses neuf enfants à des cours de musique. « Il y avait beaucoup de musique brésilienne à la maison, mais la rue a aussi beaucoup compté pour moi. Nous habitions une impasse, où il y avait tout le temps de la musique. Pendant les vacances, et pendant les fêtes de la Saint-Jean, les gens s’installaient dans la rue pour faire de la musique et danser tous ensemble. J’étais fasciné par deux musiciens amateurs, qui jouaient formidablement bien de la guitare. » A bonne école, celle de la rue, Pedro Luís apprend vite : à quinze ans, il se retrouve à donner des cours de guitare à ses amis puis, quelques années plus tard, il chante et joue dans une troupe de théâtre. Au milieu des années 80, influencé par la scène urbaine et cosmopolite de la mégapole Sao Paulo, il monte un groupe punk nommé Urge. « Je n’étais pas punk moi-même, mais j’étais fasciné par le message de rébellion et l’urgence de ce mouvement. J’ai adapté ce qui me plaisait dans le punk à une musique brésilienne d’inspiration traditionnelle. La différence entre les punks et moi, c’est que j’étais vraiment musicien, j’avais la connaissance des rythmes, de l’harmonie, de la théorie musicale. »
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Compositeur et musicien, de plus en plus reconnu et demandé par les forces vives de la nouvelle génération brésilienne, Pedro Luis se retrouve en 1996 à créer une musique originale, à base de percussions, pour le festival carioca CEP 20 000. « L’idée, c’était de faire jouer les différents éléments d’une batterie par plusieurs musiciens, comme si on avait démembré la batterie, le tout avec une dimension chorégraphique. »
C’est l’acte de naissance du groupe Pedro Luís E A Parede (qu’on appellera Plap), dont le premier album remonte à 1997. « Parede », c’est le mur de percussions érigé par trois musiciens. Sinon, les murs, Pedro Luís s’applique plutôt à les faire tomber. Sa musique effervescente mélange mélodies brésiliennes, rythmes afro-cubains, guitares rock et grosse influence funk et hip-hop, pour la joie du public local, japonais (parce que le Japon kiffe Plap) et un peu européen. A l’échelle du légendaire grand mix brésilien, rien de fondamentalement nouveau (l’héritage du cannibalisme et du tropicalisme, le parrainage contemporain de la star Lenine, qui suit le groupe depuis ses débuts), mais une approche groovy et dévergondée de la tradition.
Ponto Enredo est le sixième album de Plap (le premier à être proprement distribué chez nous), et c’est Lenine qui l’a produit. Plap a aussi embauché un nouveau guitariste électrique. Pourtant, Ponto Enredo sonne comme l’album le moins rock, le moins fusionnant du groupe. Comme si, rassasié d’expériences cannibales, Pedro Luís pouvait aujourd’hui revenir aux racines. Ponto Enredo est un disque avec des guitares électriques, mais brésilien, toujours basé sur les sambas, « déclinées de plusieurs façons », précise Pedro Luís. « Le pari était de faire un disque plus joué, moins édité ». Un album de chansons afro-brésiliennes qui ne fait pas le malin, qui sent moins le studio et le collage que le plaisir de jouer et le retour à la rue.
En vrai, Pedro Luís a joué sur les scènes du monde entier, mais la rue ne l’a jamais quitté : depuis l’an 2001, il a créé le Monobloco, à la fois groupe et école de percussions, dont l’activisme et le succès ont contribué à relancer la tradition du carnaval à Rio.
Merci à Dominique Dreyfus (traduction).
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