Il s’appelle « Umbo (Come Down) », est signé ÌFÉ et se balade entre chants sacrés des Caraïbes et futur conjugué au vocoder. Gros programme.
Ça commence avec quelques voix lâchées en l’air, ça continue dans un vrai-faux refrain ultra catchy et ça termine sur un solo de vocoder complètement lunaire. Dans le même morceau, il y a donc ces voix, inspirées des musiques sacrées yoruba, religion dans la généalogie africaine du vaudou (notamment nigériane) ; il y a une approche complètement pop, avec ces harmonies soul/dancehall qu’on ne s’étonnerait pas d’entendre sur NRJ ; et il y a cette incantation finale, sorte d’expérimentation poussant les limites du vocoder dans ses retranchements les plus excessifs (et les plus beaux). Le tout fait de Umbo (Come Down) de ÌFÉ un truc inédit, difficilement identifiable, génial dès le premier abord mais qui mérite quelques explications.
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Quand on rencontre Otura Mun, le mec à l’origine du projet ÌFÉ, il a davantage le look d’un hipster new-yorkais que de ce qu’on pourrait imaginer d’un prêtre yoruba, ce qu’il est en parallèle de sa carrière de musicien. Originaire d’une petite ville de l’Indiana, à trois heures de Chicago, dans l’Illinois voisin, il vit depuis des années à Porto Rico, où, lors d’un voyage après ses études (il se destinait à une carrière universitaire), il a découvert la religion yoruba et la rumba cubaine – deux choses qu’il a explorées avec la même passion, la même abnégation depuis. Changement de vie, donc.
Mais à 41 ans, le kid qui aimait le rock et le hip-hop n’a pas disparu ; il a seulement juxtaposé cette révélation caribéenne à son approche à lui, pensée aussi à travers la notion d’improvisation qu’il tient du jazz.
Une prière au vocoder
Umbo (Come Down) est issu du premier album d’ÌFÉ, titré IIII+IIII (ouais ouais) et dispo le 31 mars via le label Discos Ifá. Dedans, Otura Mun fait appel aux forces bienveillantes des orishas, les divinités yoruba. Les paroles disent notamment ceci :
« Drop it to the sound…
Umbo, Come Down! Come Down, Come Down!
Only your love can turn mi round, Bring it to the ground!
Umbo, Come Down! Come Down, Come Down!
Night is gone but the day seems far away, I feel you all around
Way up! Come Down! »
« Come Down, Come Down! », entend-on en référence à Olokun, orisha vivant au fond de l’océan et capable d’entendre les rythmiques de ces chants, la danse associée étant ici une forme de communication avec lui.
« That place is your home
From the start you have known
Feel you all around when the waves come crashing down »
« Les paroles sont codées, en quelque sorte, explique Otura Mun. On peut écouter ce morceau comme on veut. Certains y verront une interprétation religieuse ; d’autres pas. » A la fin du morceau, la voix de la chanteuse Yarimir Cabán, ou plutôt son vocoder, enfin le mélange vertigineux entre les deux, s’adresse cette fois à Yemaya, la déesse mère des orishas. C’est clairement une prière qui finit d’achever cette idée : faire un tube expérimental avec de la musique religieuse et du vocoder, multiplier les influences et les références, et réussir à en faire un truc évident et limpide.
Umbo (Come Down) est à découvrir sur scène le 13/4 à La Rochelle, puis le 14 à Bordeaux et le 15 à Lyon. On a testé le 23 mars dernier au festival Banlieues Bleues, à Pantin. C’était assez dingue.
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