Le rock flamboyant et magnifiquement new-yorkais de jeunes Texans de Brooklyn. Dandys électriques. Critique et écoute.
Qu’on nous pardonne d’être naïf et romantique, mais on a très bien connu New York, intimement même, bien avant d’y avoir mis les pieds. On avait visité de fond en comble les trottoirs, voire les égouts de Manhattan en écoutant le Velvet, Television, les Ramones, les Feelies, Patti Smith ou Richard Hell – et encore : certains, on ne les avait même pas vraiment écoutés avant de les vénérer, juste vus en photos. Et ça suffisait pour se faire, ado, une image très précise d’un rock’n’roll noir, hautain, plein de morgue et de mort. New York ne déçoit pas : New York est un miroir. “I’ll be your mirror”, tu l’as dit !
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Il y a quelques années, avant que les Strokes à leur tour n’incarnent cette vieille carne à cuir et lunettes noires, un groupe de Washington avait déjà fantasmé à distance tout ce rock new-yorkais, jusque dans ses moindres détails. Le groupe s’appelait Jonathan Fire*Eater, il débarqua à New York en parlant son argot maudit sans le moindre accent, habitant jusqu’au bout des ongles amochés une certaine idée, turbulente, dangereuse, flamboyante du rock’n’roll. Dans un tourbillon de chansons électriques et de vies amochées, le groupe a payé au prix fort son romantisme de la déglingue – certains d’entre eux jouent aujourd’hui le rock sombre sous le nom de The Walkmen.
Etudiants au Texas, dans la diabolique cité musicale de Denton (Midlake, Lift To Experience…), les Parquet Courts ont fait le même rêve : jouer, incarner des chansons new-yorkaises. Comme leurs illustres aînés précités, comme les Modern Lovers rêvaient eux aussi de cette ménagerie des fous depuis leur paisible Boston, ils ont usé jusqu’à l’os ce riff de guitare qui hurle “New York” à chaque fois qu’on a le bonheur de l’entendre : un mélange de coolitude, d’anxiété, de nervosité, d’urgence, d’incompétence, d’exaspération, de nonchalance.
Ils en ont fait des chansons aussi désuètes que surexcitantes, dépassant rarement les deux minutes, mais qui en ces quelques secondes postillonnées posent le décor, l’humeur, la grâce dégueulasse. Ceux qui préféreraient rester à New York, les Converse sur le trottoir, plutôt que de suivre le récent (et magnifique) album des Strokes dans ses complexes tréfonds, trouveront dans ces chansons expéditives un délicieux produit de substitution : amer, sec et pétillant.
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