Entre house minimale et techno ambient, le grand oeuvre d’un producteur allemand qui veut du bien à l’humanité : Pantha du Prince. Critique.
Il vit entre Berlin et Paris, et s’appelle Hendrik Weber. Mais on lui préférera son beau – même si incompréhensible – pseudonyme de Pantha du Prince. Auteur de deux albums majestueux sur le label Dial (Diamond Daze en 2004 et This Bliss en 2007), ce producteur leur offre un brillant successeur d’une froide beauté et d’une élégance rare, le tout après un transfert inattendu sur le label anglais historiquement pop ou rock Rough Trade.
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Le concept de “bruit noir” donnant son titre au disque provient pour lui de l’envie de capter une fréquence imperceptible à l’oreille humaine, celle d’un bruit qui augure d’une catastrophe naturelle : tremblement de terre ou inondation. Du coup, le producteur a réalisé des enregistrements dans les Alpes suisses, dans une maison à proximité de ruines qui se sont avérées celles d’un village englouti par un glissement de terrain. La musique offre ainsi une bande-son à un paysage désolé, envahie de montées organiques, avec l’idée de perte en leitmotiv.
Son électronique pourra se contenter de s’étirer sur une plage sans rythmique, nourrie de délicatesses acoustiques (Im Bann), mais saura s’emballer comme une cold-music atone et groggy, conçue pour danser dans la poudreuse, avec des clochettes qui s’agitent au loin comme si elles voulaient déclencher une avalanche (Es Schneit). Moins aride, son versant techno fait parfois un détour chez les pionniers de Detroit (Behind the Stars) et sait mettre au chaud ses invités, comme la voix reconnaissable de Noah Lennox, alias Panda Bear, d’Animal Collective sur Stick to My Side, qui entre ainsi dans une quatrième dimension pop, tandis que Tyler Pope (!!! et LCD Soundsystem) tient la basse sous-marine de The Splendour.
En réunissant la somme de ses influences dans un chalet de montagne, Pantha du Prince signe une oeuvre pleine qui réunit pop, house minimale, shoegazing et ambient pour une sortie réussie dans une tempête de neige. Et peu importe qu’il y ait du bruit noir : personne ne s’est perdu grâce au calme intérieur et à la lumière blanche que propage son album magnifique.
Album : Black Noise (Rough Trade/Beggars/Naïve)
Concert : Le 6/3 Paris (Rex Club)
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