Un an après la sortie du sublime Heartland, la symphonie pop du génie canadien était de retour à Paris pour un concert ahurissant au Café de la Danse. Owen Perfect.
Avouons-le tout de suite : depuis ses premiers pas sur Has A Good Home en 2005 jusqu’à son concert à la Villette Sonique en juin dernier, Owen Pallett nous a toujours épaté par sa virtuosité et son immense talent pour faire voler en éclats la frontière entre pop et musique classique.
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De retour à Paris pour un concert à guichets fermés au Café de la Danse, c’est encore une fois devant un public bouche bée que le Canadien est venu reconstruire son gigantesque opéra pop avec une grâce extrême et une facilité déconcertante. Car il s’agit bien de cela : casquette de titi parisien vissée sur la tête, biscotos d’éternel ado apparents, l’ex-Final Fantasy possède un don bluffant pour rebâtir en direct les morceaux de ses trois albums, corde par corde, note par note. Seul devant son micro et la foule compacte, il emboîte doucement les sons les uns dans les autres, élève pierre par pierre les grandioses édifices que sont ses titres – de Midnight Directives à This Is The Dream Of Win & Regine – jusqu’à leur redonner vie en live.
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Sans son habituel compagnon de scène, Thomas Gill, Pallett se transforme en véritable homme-orchestre et jongle avec une aisance hallucinante entre son clavier, son violon qui lui sert aussi de basse et de percussion, et ses pédales de loop. On a beau regarder de près, rien ne semble filtrer sur la façon dont le rouquin maîtrise ces dernières, les dompte en ne se trompant que très rarement – un aléa du direct qu’il comble en pouffant de rire comme un enfant qui vient de peindre le chat du voisin en rose et vert.
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Le mystère de l’extrême habileté dont le prodigieux arrangeur d’Arcade Fire fait preuve reste entier tout long du set. Il n’y a qu’à regarder les cous des spectateurs s’étirer pour tenter d’apercevoir les doigts d’Owen glisser avec rapidité sur les touches et les cordes pendant l’intro de The Great Elsewhere pour comprendre qu’il fascine autant par ses aptitudes de musicien que par sa capacité à faire croire que tout cela est d’une banale simplicité pour lui. Un pied sur sa pédale de loop, une main sur son clavier, l’autre prête à attraper son archet, Pallett se contorsionne sans aucun problème tout en passant d’une octave à l’autre d’une voix parfaitement claire, juste et sans accroc – en témoigne l’immense cathédrale harmonique Many Lives –> 49mp, jouée avec panache et plus que jamais proche de la perfection.
Si la pop orchestrale du Canadien exige une certaine concentration et un sens du rythme hors-norme – on le voit d’ailleurs frapper son torse pour tenir le compte sur la difficile reprise d’Odessa de Caribou –, elle n’est est pas moins touchante. Pris dans ses propres mélodies, Pallett lâche du lest et entraîne le public avec lui. Plus détendu qu’à La Maroquinerie l’année dernière, il se permet des écarts, se marre avec la foule, joue sourire collé aux lèvres, et transforme la solennité que créer sa musique en une grande célébration, tour à tour grave, extatique ou profondément émouvante.
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« Je sais que certains sont en train de se demander ‘pourquoi j’ai payé vingt euros pour voir un type faire des sons bizarres sur son violon ?’, lance Owen en riant alors qu’il loop un étrange accord d’un des titres d’Heartland, « il faut me faire confiance« . Porté par l’opulence de Lewis Takes Off His Shirt, colossal final du concert joué avant un rappel amplement mérité, on le croit et le suit les yeux fermés. In Owen We Trust.
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Photos : Ariane Gruet-Pelchat
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