Avant de s’envoler pour Coachella, l’électronicien Français nous offre quelques dates du côté de chez nous. Il était hier soir à La Cigale, à Paris. Nous aussi.
Le français, originaire d’Antibes, était de retour l’année dernière avec son double album Hurry Up, We’re Dreaming. Long voyage au bout de la nuit – une nuit noire, une nuit sans lune – ce double exploit a confirmé la réputation d’un gars de chez nous qui depuis bien longtemps a trouvé ses marques – et s’est fait remarquer – un peu partout, à commencer par les Etats-Unis.
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Indice sur le succès international de M83 : c’est un Italien installé à Londres qui assure sa première partie, chez lui en France. Et cet Italien n’est pas des moindres : Mauro Remiddi, alias Porcelain Raft, arrive armé de sa guitare sur une scène envahie de synthés, de fils et de machines plus ou moins identifiées. A l’image de son récent album Strange Weekend, Porcelain Raft enchaine les morceaux d’un air affecté, torturant sa guitare dans une frénésie se brouillant petit à petit dans une réverb poussée jusqu’à l’extrême. Mais il lâche bientôt son arme, faisant confiance à un sampler surchargé d’enregistrements réglés au poil, et empoignant un tambourin gigotant qui viendra mettre un peu de piment acoustique dans l’electro parfois obscure du garçon. Celui-ci se tord et crie, parait souffrir, mais du côté du public tout semble aller pour le mieux.
Après l’entracte, l’horrible monstre de M83 débarque au bord de la scène. Porté par des flashs de son et de lumière chevaleresques, l’affreux masque, poilu et cornu, tend les bras de ses griffes dégoutantes : le diable vient d’ouvrir le bal, mais un bal bien trop beau pour lui. Il s’enfuira donc rapidement pour ne plus jamais revenir. M83 arrive pour de bon : Anthony Gonzalez, tout de noir vêtu, accompagné de trois musiciens. Ils commencent par le début : l’Intro de Hurry Up, We’re Dreaming. Le ton est donné. Céleste et perché, le groupe entame une symphonie des plus folles, sous les néons paralysants qui ratissent la salle, sentinelles de cette nuit bleue de science fiction. Irréel parfois en effet, le chant d’Anthony est aussi sensible et délicat que sa musique est dense et vibrante. Il nous parle bientôt : « On est un peu nerveux, merci beaucoup d’être là ! » De rien, t’inquiète, aurait-on envie de lui dire : le plaisir est déjà bien entamé, alors que le concert ne fait que commencer.
Les quatre acolytes jouent en effet, par la suite, leur collection de morceaux, pour arriver rapidement à la grande Reunion. Ses cris entêtant détendent immédiatement les nuques, agitant par là même le reste des corps : si M83 veut nous piéger dans un rêve comateux et halluciné, c’est pour mieux anesthésier nos sens et nous conduire vers des envolées electro furieuses et vraiment dingues. Le jeune bassiste, lui, se déplace pour l’occasion vers une boite à rythme qu’il traitera violement, manquant de peu – c’est l’impression qu’il donne – la crise d’épilepsie. Anthony bidouille quant à lui une drôle de machine, débordante de fils et reliée à son sampler, duquel il arrache des morceaux de bravoures inattendus, espérés peut-être, réussis dans tout les cas.
Si bien qu’on ne tient pas longtemps assis au balcon de La Cigale : on ne résiste plus, on veut se mêler à la messe, approcher l’autel et prier avec le reste des fidèles. Arrivés devant la scène, les choses se brouillent un peu, perdus qu’on est maintenant dans le fond étoilé du décor. Mais une chose est sure désormais : M83 est un groupe à danser, à planer, à rêver. Le public s’excite, le parquet tremble : c’est M83 qui prend son élan pour s’envoler. Les quatre enchanteurs jouent maintenant la très calme, la très belle Wait, avant de nous prendre à rebrousse-poil avec un vrai bordel sonique, qui perd bientôt toute logique pour gagner en sens : car si M83 part dans toutes les directions, le groupe contourne toutefois l’absurde en passant par le ciel, où il semble se sentir chez lui. A mi-chemin entre french touch du passé et rock du futur, M83 assourdi, étourdi avant d’assommer avec ce qui se présente comme le cadeau final : la très attendue Midnight City. Tout le monde danse, tout le monde est ravi. Mais arrive la cerise sur le gâteau : un saxophoniste, en costume, comme sorti d’un songe cotonneux, jouant à l’américaine un solo kitsch et vibrant, délicieux. La salle est en liesse.
Puis M83 fait mine de s’enfuir. Les gens crient, hurlent, acclament. Les quatre magiciens de la nuit reviennent pour une note finale, bien décidés à clôturer en beauté la cérémonie. Une course folle démarre à travers les limbes. Est-ce de la house, de la techno, du rock, de l’electro ? On ne sait plus trop, on sait seulement que c’est la fin, l’explosion finale, et que celle-ci se fait dans la danse et la sueur. M83 salue théâtralement, chaleureusement. Anthony Gonzalez se sera même mis à genoux. Mais le public le lui rend bien, il a senti que venir voir M83, ce n’est pas qu’assister à un concert, c’est vivre une expérience.
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