Chaque année, M Pour Montréal rappelle au Monde à quel point la ville reste un impressionnant creuset de sangs neufs et d’innovations. 2008 fut un grand cru : petit tour des grandes découvertes.
Montréal, la belle, la cool, fin du mois de novembre. Les érables ne sont plus rouges, ils ont dépassé l’automne depuis longtemps. Comme tout le monde, même les locaux pourtant rompus aux extrêmes, les érables sont bleus, ils grelottent dans les bises glacées, attendant la neige avant d’en espérer la fonte. Et la fonte, paradoxalement, viendra ici cette année avant même les vrais blizzards : c’est l’excellent M Pour Montreal, grand petit festival destiné à montrer au Monde quel réservoir musical cette ville unique fut, est, reste, et sera.
Entre deux chauds cocktails, entre deux rencontres hilares entre professionnels et délégués venus du monde entier, entre sept douzaines bières fraîches, il faut bien se réchauffer, on a pu se rassurer : plus encore que l’année dernière, avec quelques cousins de Toronto ajoutés à l’affiche, le niveau est exceptionnel. Et la conquête du monde peut reprendre : attendez-vous, sous peu, à voir débarquer sous nos plus douces lattitudes une impressionnante armada montréalo-torontoise, en pleine bourre, en plein renouveau.
C’est la force du Canada, la force du Québec, et celle de Montréal en particulier : des groupes en mélanges constants, hors des sentiers battus, rebattus et rerebabattus mais pouvant prétendre, les doigts dans le nez et le cynisme au placard, à la plus belle des universalités. De ces quelques jours exténuants, de cette saine fatigue, de cette marée haute de découvertes et de confirmations, on retiendra beaucoup de bonheur, d’abord, et quelques tonnes d’excitation, ensuite –à moins que ce ne soit l’inverse.
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[attachment id=298]On se souviendra ainsi longtemps, les joues encore écarlates tant la claque fut brutale, des extraordinaires Duchess Says (en photo, MySpace). Un truc totalement fou, qui tape au bide jusqu’au plaisir coupable, jusqu’au Cramps masochistes. Une électro punk et uppercutante, une chanteuse folle furieuse, joueuse, terrifiante, hardcore, la plus impressionnante vue depuis quelques siècles -même sur YouTube, c’est effrayant, imaginez alors ce que cela peut donner face à une foule en fusion.
On gardera également, bien au chaud dans les mémoires, les fascinants et étranges Pas Chic Chic (Myspace), où officie des membres de Godspeed, Set Fire to Flames ou Fly Pan Am notamment : les règles kraut sont parfaitement maîtrisées, digérées, modernisées, surplombées par un chant possédé, par de drôles d’influences 60s et 70s, posées sur le reste comme l’OVNI sur l’exploitation de canneberges.
On n’oubliera pas l’électro au cordeau des très nouveaux et très classes Claass (MySpace), très récente émanation des toujours excellents We Are Wolves –on ne comprend d’ailleurs toujours pas pourquoi ces derniers ne sont pas encore parvenu à traverser l’Atlantique pour méchamment botter le cul aux Klaxons.
On conservera une longue et belle banane en repensant aux ultra-efficaces Gatineau (MySpace) ou Radio Radio (MySpace), jouant aux mythiques Foufounes Electriques : le hip hop québécois ou acadien, l’accent à trancher à la hache bucheronne, se porte décidément très bien –et est surtout beaucoup plus rigolo que celui d’ici. Laisseront aussi quelques traces fumantes le show foutraque et hilarant de Misteur Valaire (site du groupe), des gars qui joue en anorak pour mieux faire brûler un groove démentiel et des bricolages dingos. Ou le concept passionnant de The National Parks (MySpace), des morceaux-vidéos à la fois enregistrés et filmés en forêt, avec une très grande présence scénique –pas loin de l’intensité ou de l’unicité d’un TV On The Radio. On en oublie quelques uns, beaucoup, par manque de place : rassurez-vous, si le monde est juste, Woodhands, Winter Gloves, Arkells ou les Dales Hawerchuk devraient bientôt vous refiler quelques acouphènes pas trop loin de chez vous.
Photo Sophie Samson
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