On conclue le débat amour-haine de la semaine sur Coldplay par un compte-rendu de leur énorme show au Parc des Princes. Récit du concert d’un groupe très clairement taillé pour les stades.
En clamant haut et fort son amour pour U2, Coldplay n’a jamais caché son envie de devenir un groupe de stades. Porté par une demi-douzaine de tubes en dix ans, et une maîtrise dans l’art de s’inviter sur la FM, ce désir de foule de et de consécration publique fut satisfait hier soir, dans l’enceinte d’un Parc des Princes plus souvent habitué à héberger des supporters du PSG que des jeunes filles en jean blanc et au brushing bien fignolé. Car Coldplay attire aujourd’hui le même public que Calogero ou Dido, et plus les années passent, plus la musique du groupe fait le grand écart entre rock indé hérité de Radiohead ou Jeff Buckley et grosse varièt, ceci dit plutôt bien fichue- un genre musical que d’aucun pourraient qualifier de modem-pop, ou de rock consensuel- mais qui trouve chez certains résistants encore un écho plus heureux.
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Quoiqu’il en soit, en boudant la Porte de Saint-Cloud, les détracteurs de Chris Martin ont certainement manqué l’occasion de leur vie : le concert parisien du groupe fut, pendant plus de deux heures, une immense et époustouflante célébration de stade, ou tout bêtement ce qu’on appelle un show : souvent le groupe a donné l’impression d’organiser la cérémonie d’ouverture des prochains Jeux Olympiques mais en jouant toutes les équipes à la fois- drôle de coïncidence, on a d’ailleurs croisé Nelson Montfort dans les gradins.
Après une drôle de prestation des Flaming Lips, toujours aussi psychotrope mais plutôt embarrassante dans l’enceinte du Parc des Princes (mise en scène d’illuminé, mais mauvais son), le groupe monte sur scène peu après 21h et, niveau ambiance et décor, c’est un peu comme si un grand malade avait décidé de combiner le 14 juillet à la Défense, la biennale de la vachette et France-Brésil 98. A ceux qui déplorent le manque d’intimité et d’authenticité des concerts dans les stades, Coldplay semble avoir décidé de fermer le clapet en poussant justement le concept à son paroxysme, faisant du Parc des Prince son terrain de jeu (à plusieurs reprises, le groupe se produira au milieu de la foule, fera éteindre les lumières ou se lancera dans un concours de lumières de téléphone portable, pathétique et drôle à la fois).
Porté par un Chris Martin surexcité, qui aura au final probablement couru l’équivalent d’un semi-marathon, le groupe enchaîne un nombre impressionnant de chansons connues de tous (In My Place, Yellow, The Scientist, Viva La Vida ou encore… Billie Jean), laissant tout au long du set entrevoir un désir, probablement suscité par les tournées répétitives, de changer la forme de ses morceaux. Les ballades deviennent saccadées, les guitares s’effacent au profit des pianos, les rythmes s’accélèrent ou disparaissent, et certains titres semblent être leurs propres remixes. Seule la voix de Chris Martin, limpide et bouleversante, reste fidèle : bien plus que de Bono, c’est de Michael Stipe que l’Anglais semble avoir assuré la relève. Si la froideur et l’élégance sobre des débuts du groupe a laissé place à une convivialité et un côté bon-enfant parfois un peu pénibles (les feux d’artifices…), la grâce sait reprendre ses droits par instants, notamment sur un Fix You à la conclusion magistrale, ou une version au piano de The Hardest Part à foutre la chair de poule à un roadie de Mass Hysteria. C’est d’ailleurs ces images-là qu’on gardera en tête, priant pour que le groupe ne sombre pas davantage dans les pièges de la mégalomanie et sache, côté ambitions, se satisfaire de cette tout de même très rigolote et ludique parenthèse.
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