Cette année encore, le Hellfest a battu un nouveau record d’affluence : 80 000 visiteurs venus de 50 pays. Une édition presque débarrassée des attaques habituelles, moins de deux mois après le décès du député Patrick Roy, lobbyiste infatigable du metal.
Dans les lotissements jouxtant le complexe du Val de Moine à Clisson (44) beaucoup de volets sont baissés mais sur le site du Hellfest, malgré la pluie intermittente cette année, c’est grand soir. Près de 80 000 fans de metal sont venus de 50 pays différents pour 120 concerts sur trois jours. Record battu pour ce festival à 5 millions d’euros de budget.
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Sur les quatre scènes et dès potron-minet, soit 10 heures, les plus courageux bravent les effets d’une courte nuit pour saluer les premiers groupes. Et toujours les déguisements comme chez les Playmobil : vikings, pirates, curés (!), vampires… Et puisque la bière est l’amie numéro un du hard-rocker, au top de la hype cette année on trouvait le pichet plastique estampillé « Hellfest », pratique pour accrocher à la ceinture son 1,5 l de cervoise.
Attaques mises en sourdine
En 2011, les attaques anti Hellfest ont été mises en sourdine. L’absence récurrente d’incidents dans un festival où les gendarmes ne se font pas cracher dessus a dû aider à aplanir les peurs. La déprogrammation de deux groupes ouvertement tendancieux « mais pas antichrétiens » relève Ben Barbaud, co-fondateur, fut aussi un gage de bonne volonté. Enfin, le récent décès du député-maire de Denain (59) Patrick Roy, infatigable et seul lobbyiste du metal, a calmé les ligues catholiques qui ont donc reporté leurs attaques sur le sponsor bière du Hellfest !
Le samedi, un feu d’artifice, hommage au député à la veste rouge a lieu au son de For Those About to Rock, We Salute You d’AC/DC. Sur fond de photos de fans prises avec lui, de sincères et émus « Patrick, Patrick ! » s’élèvent. Qui maintenant pour défendre le metal en leur nom ? Frédéric Mitterrand ne s’est pas déplacé et il suffit de se rappeler le mépris de Michel Drucker devant la victoire des Finlandais de Lordi à l’Eurovision 2006 pour comprendre que le genre devra encore s’aider lui-même.
Les groupes
Chez les anciens, Judas Priest, The Cult ou Mr. Big sont à la hauteur de leur réputation Et Thin Lizzy reformé sans Phil Lynott a quand même de la gueule. Scorpions venu aller/retour faire une pige à 150 000 euros a tourné à vide, mais a garanti au Hellfest un record d’affluence malgré de pénibles soli de batterie et de guitares.
Ozzy plutôt en forme s’appuie aussi sur les soli pour souffler, mais arrose toujours la sécu au canon à mousse. Hélas, Rob Zombie pour le côté shock rock peine à égaler Alice Cooper, avec un show un peu poussif. Iggy fait du Iggy, applaudi par un public qui n’a pourtant pas investi 144 euros le pass trois jours pour voir le pote de Bowie montrer ses fesses. Mais l’ambiance est à la coule et il suffit de voir le site bourré à craquer reprendre Still Lovin’ you les yeux humides pour se rendre compte que le metalhead n’est pas un mauvais bougre. Apaisé par la bière, le shit ou le muscadet local, il applaudit même les formations moins rugueuses, tel l’ambient-prog d’Anathema ou les inclassables de Young Gods.
Mais si le Hellfest attire un tiers d’étrangers, c’est que chaque édition apporte son lot d’apparitions cultes. Comme Kyuss côté stoner (reformé à 80% moins Josh Homme starifié depuis avec Queens of The Stone Age) qui a clos l’affaire dimanche, ou Coroner, trio suisse époustouflant rayon techno-thrash. Non moins virtuose, le death metal de Morbid Angel avec le retour de David Vincent au chant. Le charismatique floridien a un côté Gene Simmons (Kiss) sans make-up et ferait un excellent remplaçant le jour où Kiss deviendra une franchise avec d’anonymes musiciens sous le maquillage. Ne riez pas, c’est vraiment prévu.
Qui assurera la relève pour les prochaines éditions ?
Ce qui est aussi prévu en 2012, c’est la délocalisation du Hellfest à 500 m de son emplacement « historique ». Mais il va falloir hausser la jauge et atteindre les 35 000 fans par jour afin d’attirer les dernières locomotives non épinglées au tableau de chasse clissonien : Iron Maiden, Aerosmith, Rammstein ou System of a Down. Quant à Metallica, sous contrat avec le Sonisphere, son cas est plus épineux.
Sans ces grosses têtes d’affiche, à terme, c’est la stature du festival qui serait remise en question. Face aux retraites annoncées des Scorpions et Judas Priest et hormis un Iron Maiden vieillissant, qui pourra assurer la relève ? Pas sûr que Sodom, Severe Torture ou Total Fucking Destruction, malgré l’exquise poésie qu’exhale leurs patronymes, suffisent à faire affluer gros médias et foule en liesse.
Guillaume B. Decherf
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