De passage à Paris, Jeff Mills a mixé, ce mardi 18 avril, depuis l’Auditorium de la Bourse de commerce pour faire (re)découvrir “Metropolis” de Fritz Lang. La rédaction y était, on vous raconte.
Depuis 1927, le film de Fritz Lang a connu de nombreuses péripéties : échec critique et commercial à sa sortie, Metropolis a été raccourci, sa version originale perdue, et même colorisé et réinterprété par Giorgio Moroder en 1984. Il faudra attendre 2008 et la redécouverte de bobines au Musée du cinéma de Buenos Aires pour lancer la restauration du film dans une version quasi identique à l’originale. En 2010, Metropolis renaît ainsi de ses cendres ; et en 2023, Jeff Mills jette une nouvelle allumette sur le brasier ardent qu’il a toujours été.
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D’une élégance incontestable, le compositeur originaire de Détroit, capitale de la techno, a une nouvelle fois manifesté un talent pur et impérissable. C’est sur la scène de l’Auditorium de la Bourse de commerce – Pinault Collection que Jeff Mills a présenté sa troisième version de la bande originale du film dystopique Metropolis.
Debout face à ses platines, l’Américain, concentré, appliqué, se lance pour 150 minutes de tension entre kicks obscurs, synthés détraqués et mélodies optimistes. Le piano, les tambours et les basses résonnent à travers la salle. Le rythme déconcertant s’empare des spectateur·ices et maintient leur attention. Et Jeff Mills se fait peu à peu oublier. Chaque personne fixe le film, comme envoûtée, absorbée par les six morceaux du nouvel album electro-symphonique Metropolis Metropolis du compositeur, sorti en mars sur le label Axis Records.
La modernité incarnée
Le mélange entre des images vieilles de cent ans et une bande originale flambant neuve surprennent tant elles paraissent travailler en symbiose. Lorsque Freder, le fils du maître de Metropolis, découvre la cité souterraine et ouvrière, les sonorités techno semblent évidentes, renvoyant immédiatement au bruit des machines, des usines allemandes dystopiques de Lang à celles de Détroit. Les scènes les plus connues du film sont revisitées à l’aune du talent du compositeur : de la transformation de Maria en robot à la révolte finale, Metropolis continue de se passer des mots, le récit n’étant plus guidé que par les sons intérieurs des moteurs et de la ville et par la colère qui gronde au fond des personnages.
Cet instant mémorable et hors du temps rappelle les similitudes entre le monde fictif de Fritz Lang et le nôtre. Metropolis Metropolis, perçue comme la nouvelle prouesse musicale de Jeff Mills, traduit parfaitement les dysfonctionnements sociétaux de ces dernières années et rappelle que “The Masters of Work and Play” (“les maîtres du travail et du jeu”), c’est nous.
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