Mardi et mercredi soir, on était à Bruxelles pour fêter les vingt ans des Nuits Botanique. L’occasion de vivre le retour de l’excellent Connan Mockasin et de confirmer la bonne santé de la scène belge. On vous raconte nos coups de cœur.
LE VOYAGE : Connan MockasinLe voyage (spatial) de cette 21ème édition des Nuits Botanique restera sans doute le concert flottant donné par Connan Mockasin sous le chapiteau. En 2011, on avait découvert le Néo-Zélandais à la faveur d’un album étonnant où la pop la plus habiile venait téléscoper un psychédélisme débridé. Après avoir accompagné Charlotte Gainsbourg sur disque puis sur scène en 2012, Connan revenait donc à des affaires plus personnelles ce mardi soir à Bruxelles. L’occasion de réincarner, pour la première fois depuis six mois, les magnifiques rêveries soniques de Forever Dolphin Love. Au moment de jouer son album sur scène, le musicien nous avait habitué à briller par la grâce et la discrétion. Ce soir-là à Bruxelles, il était visiblement sous l’influence d’autres puissances supérieures. Allumé, éméché et désinhibé, le musicien apparaît plus à l’aise et volubile que jamais. Les chansons ne s’enchaînent plus dans un souffle constant mais s’entrecoupent de commentaires toujours décalés, parfois décadents, mais finalement en phase avec les vapeurs enivrantes d’un concert radicalement psychédélique. Avec Caramel, nouvelle chanson plus qu’entraînante et She Lives In My Lap, reprise inattendue d’Outkast, Connan Mockasin se permet même d’inviter les spectateurs les plus sceptiques dans le sillage de son voyage spectral. Un nouvel album, vite !
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
LE MOMENT DE SOLITUDE : The Leisure Society
Quelques minutes avant l’ivresse et l’allégresse ordonnées de concert par Connan Mockasin, The Leisure Society et sa pop de salon avait un peu endormi les âmes perdues sous le chapiteau du Botanique. Si le nouvel album des Anglais passe sans encombres l’épreuve de l’écoute concentrée (au casque, les yeux dans le vide, l’humeur nostalgique), sa matérialisation scénique laisse perplexe. Presque étouffées et vides de rythme, les chansons peinent à nous parvenir. On a surpris quelques festivalières s’assoupir contre les poitrines plus ou moins larges de leurs accompagnateurs… Peut-être les seules caisses de résonance valables d’un concert bizarrement insonore.
LA BONNE SURPRISE : Liesa Van Der Aa
La journée de mercredi était dédiée à la Belgique et à sa nouvelle scène. On attendait particulièrement la performance de Liesa Van Der Aa; diva à violon, responsable du magnifique album Troops sorti l’année dernière. On arrive donc en avance, prêts à assister au duel annoncé entre la voix sauvage et l’instrument classique. Surprise à l’arrivée de la musicienne : une chorale mixte de onze voix guidées par un chef d’orchestre l’accompagne sur scène. Liesa Van Der Aa commence tambour battant en maltraitant son archer et en enregistrant des boucles de violon qui serviront de structure au concert une heure durant. La musicienne alterne entre trois instruments : sa voix, son violon… et son violon, renversé et utilisé à la manière d’une mandoline. Une équation subtile où l’influence de PJ Harvey semble habiller chaque prouesse vocale de la chanteuse. Deux guitaristes et un bassiste viendront remplacer la chorale pour transformer la fin de concert et lui donner des accents rock moins nuancés. Qu’importe, Liesa Van Der Aa, son violon, son archer et son assurance ont su charmer un public écarquillé et ébahi. Preuve irréfutable de la valeur de l’instant : iphones et appareils photos sont restés dans les poches et les sacoches pendant une grosse partie du concert. Les souvenirs n’en seront que plus précieux.
Le chanteur de Balthazar s’échappe le temps d’un projet solo et c’est le coup de foudre. Dans la pénombre de l’hémicycle de la Rotonde, Maarten Devoldere chante, joue du clavier, pince les cordes de sa guitare, regarde le public dans le blanc des yeux, sans jamais tomber dans le lieu commun de l’homme orchestre. La voix et chaude, les compositions déjà mûres et précises. L’élégance du musicien rappelle la classe froide et les facéties de Sean Nicholas Savage. Mais la folie est ici digérée, maîtrisée. En ressort un conte noir, nostalgique mais jamais plombant, cathartique mais jamais impudique. Parce qu’il a réussi à arrêter le temps l’espace d’une petite heure, parce qu’il est parvenu à s’inviter avec grâce à la table de Lou Reed, Bowie et Leonoard Cohen, Warhaus constitue à lui seul le saut dans le temps, la surprise, la découverte, la claque de ces deux jours passés en terres bruxelloises. On vous aurait bien fait partager la classe du bonhomme avec un Soundcloud ou un Bandcamp mais rien n’est disponible à l’écoute sur Internet. Pour parvenir à percer un peu de son mystère, on vous souhaitera simplement de le croiser cet été en festival, ou l’année prochaine sur une plus grosse scène pour la 22ème édition des Nuits Botanique.
Nuits Botanique 2013 : jusqu’au 13 mai à Bruxelles
{"type":"Banniere-Basse"}