Le week-end dernier, dans le désert californien se tenait le festival Coachella. De la démesure de Kanye West au triomphe d’Animal Collective, nous étions sur place : récit et vidéo des prestations.
L’affiche était si impressionnante, qu’il semblait impossible de ne pas assister, cette année, à Coachella. On connaissait pourtant les inconvénients du festival dans le désert. Les quatre heures de route qui peuvent se transformer en sept, cauchemar éveillé sur le freeway qui relie Los Angeles à la Coachella Valley, au beau milieu de nulle part. La chaleur étouffante en journée et le froid, dès que la nuit tombe. Les motels pouraves dont le prix triple, et dans lesquels certains s’entassent pour éviter le camping dans la poussière ou la location d’une caravane. Et pourtant. Devenu, après douze ans d’existence, une référence en matière de musique indé dans le monde entier, Coachella Valley Music & Arts Festival affichait complet en moins de deux semaines, avec une seule option cette année: acheter un pass pour trois jours. 320 $.
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Vendredi
Ça commençait mal. Le “Coachella trafic” (les bouchons de Coachella) avait débuté dans L.A. même, en sortant de Downtown. Pas moins de trois accidents sur la route (game over pour ceux qui se sont mis à picoler trop tôt) et une arrestation comme on en voit trop ici, avec dix flics de la LAPD pointant leurs mitraillettes automatiques sur un seul suspect. Une fois sur place, il fallut lutter pour récupérer les multiples bracelets donnant accès à ceci ou cela. Ratés donc les Tame Impala, Ms. Lauryn Hill, Warpaint et les rappeurs futuristes d’Odd Future (ces derniers, dont le festival devait sanctionner le triomphe devant le grand public, s’avéraient d’après les avis si décevants que la moitié de l’audience s’était barrée au milieu de la performance). Après des Interpol assez fadasses, les Black Keys donnent à cette première soirée de l’ampleur. Puis, face aux ados poussant des cris à l’arrivée des lourdingues Kings of Leon, on se demande ce que font ce genre de superstars assez insipides dans un festival dit “indie”. En fin de soirée, les Chemical Brothers, évoquent les bons souvenirs des nineties avec leur puissance sonique intacte. De quoi faire oublier les deux heures passées dans le parking, pour sortir du site, entre 1 h et 3 h du mat’.
Samedi
Le problème, à Coachella, c’est qu’il y a vraiment l’embarras du choix. Plus de soixante groupes par jour, répartis sur six scènes. Un véritable marathon et une frustration constante, qui implique de voir trois chansons d’un tel pour ne pas rater la fin du set d’un autre. Ainsi, renonçant à Yelle et ne pouvant s’attarder devant Cage The Elephant, on fonce voir Glasser, injustement relégués sur la petite Goby Stage. Portée par une Cameron Mesirow sublime, vêtue de blanc, leur musique planante colle pourtant mal avec le soleil de plomb de l’après-midi. A contrario, c’est cette ambiance magique du désert une fois la nuit tombée, avec la pleine lune, les palmiers illuminés et le ciel étoilé en toile de fond, qui permet à Neko Case d’exercer son envoûtement de sorcière. Mais il faudra attendre The Kills pour que le public se lâche tout à fait, fasciné comme nous par l’intensité d’Alison Mosshart et la classe de l’impeccable Jamie Hince. Les puristes vont ensuite écouter la machine Wire s’emballer une fois de plus. Furax, Colin Newman nous confiera en backstage avoir vécu un “enfer”: “c’est l’un des festivals les moins organisés et les moins respectueux des artistes où l’on a jamais joué.”
On n’est donc pas les seuls à penser que marcher une heure sous un soleil de plomb pour accéder au site, en passant dix barrières de sécurité dignes d’un campement secret de la CIA, c’est tout de même un peu de l’abus. De quoi nourrir les critiques qui estiment que, devenu mainstream, le festival est en train de perdre le charme bordélique de ses débuts. Heureusement, Animal Collective remet tout le monde d’accord : on peut toujours vivre de grands moments ici. Et quand Arcade Fire, autremoment fort, s’empare de la scène (au détriment de Raphael Saadiq, programmé, le pauvre, au même moment), Win Butler commence par ces mots : “Si on m’avait dit, il y a sept ans, que je reviendrais jouer ici en tant que tête d’affiche, sur la même scène qu’Animal Collective, je n’y aurais jamais cru”.
Dimanche
Après une mise en bouche avec le duo formé de Nas et de Damian Marley, on zappe à regret Tinie Tempah pour constater que les très huppés Best Coast manquent encore d’expérience de la scène. Malgré les blagues de Bethany Cosentino, leur performance reste trop mécanique pour convaincre. On se console devant la furie aux accents quasi métal de Death From Above 1979, les Canadiens qui reviennent enfin, après sept ans d’absence. Autre comeback, qui remonte à bien plus loin, Duran Duran s’empare ensuite de la grande scène. Circonspects, des ados observent leurs parents s’enthousiasmer sur I Don’t Want Our Love. On citera aussi, parmi les meilleurs moments de ce cru 2011, le funk électro de Chromeo et la mélancolie de Phantogram.
Et déjà, la soirée touche à sa fin. The Strokes réunissent 50 000 de leurs fans, qui reprennent en chœur Last Night. Derrière ses lunettes de soleil, un Julian Casablancas déchiré se moque des uns et des autres: “Vous êtes venus pour Kanye, vraiment ?” Enfin, PJ Harvey s’étant fait trop attendre, la foule se replie avant la fin de sa performance vers le maitre de cérémonie : sa majesté Kanye West, qui apparaît sur une grue, à 100 mètres du sol. Trente danseuses, sur scène, s’agenouillent devant lui. Coachella, au fond, est bien un festival US, à l’image de Sir West : un peu mégalo, un peu too much, mais férocement excitant.
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