Un mois avant la sortie de The Rip Tide et son prochain passage à l’Olympia le 12 septembre, l’Américain et sa troupe sont venus présenter leur troisième album au théâtre antique de Lyon. Retour extatique sur le sublime concert de Beirut aux Nuits de Fourvière.
Autant l’avouer d’emblée : depuis la toute première écoute de Gulag Orkestar en 2006 jusqu’à la récente découverte du magnifique The Rip Tide (dont on vous parlera à la rentrée), notre amour pour Beirut ne s’est pas altéré – mieux : il n’a fait que grandir. C’est donc avec une objectivité toute relative et les larmes déjà au bord des yeux que l’on a débarqué, hier soir, aux Nuits de Fourvière pour assister au show lyonnais de Zach Condon et sa bande que l’on n’avait pas revus (en vrai) depuis leur passage à l’Olympia en 2007 et (virtuellement) depuis leur concert à Arles retransmis en direct la semaine dernière par Arte Live Web.
A peine le jeune homme arrivé au milieu du théâtre antique de Fourvière, une chose surprend d’emblée : la présence scénique de Condon dépasse de très loin celle de ses anciennes prestations. A l’aise, sourire aux lèvres, l’Américain se pose en effet en chef d’orchestre brillant de ses musiciens et s’impose comme le meneur évident de sa joyeuse équipe désormais exclusivement masculine. Zach parle, rit, tente quelques blagues, tape des mains et se frappe le torse. D’une main, il signe le clap de fin de Mimizan, premier morceau du set ; d’un coup d’œil, celui d’Elephant Gun, immense titre à l’ivresse irrésistible dont on ne s’est jamais vraiment remise.
Entouré de son accordéoniste, son batteur, son bassiste et de ses deux bluffants hommes-orchestre – dont Kelly Pratt, déjà vu aux côté d’Arcade Fire –, Condon livre quelques titres de The Rip Tide, son troisième album à venir en août. Démesurée sur disque, Vagabond se fait voler la vedette par East Harlem et sa mélodie entêtante made in Beirut et surtout par Santa Fe, hymne schizophrène où l’électro des jeunes années de Zach rejoint enfin la pop orchestrale de Gulag Orkestra.
Pendant que le public hurle « trop de basse » en boucle par-dessus les chansons et que l’on en vient à souhaiter un génocide de lyonnais (on apprendra plus tard que, contrairement à la fosse, le son de basse de Paul Collins était effectivement intenable dans les gradins – pardon Lyon), Zach ressort des tiroirs les titres de son premier album, de The Flying Club Cup et de l’ep March Of The Zapotec/Holland. On redécouvre ainsi un Postcards from Italy minimal et épuré mais toujours aussi enivrant, un Scenic World éclatant chanté d’une timbre centenaire plus abouti que jamais. Car ce qui frappe le plus, c’est la voix de Zach : toute en rondeur, profonde, elle donne des frissons et des haut-le-cœur. Elle résonne à travers le théâtre antique, semble plus maîtrisée qu’auparavant et tient le distance tout au long du concert dont les apogées seront les incroyables Nantes, Cherbourg et A Sunday Smile, moments de ferveur joliment brisés par le grand folklore de My Night With a Prostitute from Marseille, dernier morceau du set à l’énergie démente.
Après une courte pause et malgré un public plutôt difficile (on remercie d’ailleurs chaleureusement la personne à côté de nous qui tapait à contretemps dans ses mains pendant l’intégralité du concert), c’est au piano que Zach Condon revient pour jouer la déchirante Goshen, dont la grâce pure et la beauté ne font que confirmer que The Rip Tide sera l’un de nos albums de l’année. Le temps s’arrête avant de reprendre son cours avec Mount Wroclai. La boucle est bouclée avec l’opulent Gulag Orkestar, morceau inaugural du premier album de Beirut qui clôture le concert et qu’on aimerait sincèrement voir jouée à notre mariage ou à notre enterrement (ou les deux).
Devant la traditionnelle envolée de coussins de Fourvière, Condon reviendra une dernière fois interpréter The Penalty seul au ukulélé dissipant ainsi tous nos doutes sur l’avenir de celui que beaucoup disaient épuisé. Cette fois, on en est sûre : Beirut, c’est mieux que le ProZac(h).
Photo : Romain Massola
Concert : le 12 septembre à Paris (Olympia)